On ne peut pas rompre une période d’essai pour cause de Covid-19 (Jean-Pierre Willems)
L’absence d’obligation de motiver la rupture d’une période d’essai conduit souvent à considérer que la rupture peut reposer sur tout motif. Il n’en est rien et il est important de rappeler qu’aucune cause économique ou extérieure au salarié ne permet de procéder à la rupture du contrat de travail pendant la période d’essai.
Une analyse de Jean-Pierre Willems
Chargé d’enseignement politiques droit et pratiques de formation - master DRH @ Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne • Consultant @ Willems Consultant
pour News Tank.
La finalité de la période d’essai
La période d’essai, comme son nom l’indique et comme le rappelle l’article L.1221-20 du Code du travail a pour finalité l’appréciation de la capacité du salarié à s’intégrer dans l’entreprise et à réaliser les fonctions qui lui sont confiées.
Pendant la période d’essai, les règles relatives à la rupture du contrat de travail sont écartées (C. trav., art L. 1231-1).
Il en résulte que la seule motivation possible de la rupture du contrat de travail pendant la période d’essai tient à l’appréciation des capacités professionnelles. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle la motivation n’a pas à être explicitée dans le courrier de rupture : il ne s’agit pas d’une dérogation à l’obligation qu’a tout employeur d’informer le salarié des motifs de la rupture du contrat. Comme il n’existe qu’un motif possible, le salarié est nécessairement informé de la raison qui conduit à la rupture de son contrat.
La sanction des ruptures non inhérentes à la personne du salarié
Les tribunaux sanctionnent régulièrement les employeurs qui rompent des périodes d’essai pour des raisons économiques ou ne tenant pas à la personne du salarié.
- Ainsi, ont été condamnés les employeurs qui ont rompu la période d’essai :
- Parce que l’activité du magasin n’était pas bonne ( Cass Soc. 24/11/1999, n° 97-43 054 ) ;
- Parce que l’emploi est supprimé (Cass. soc., 20/11/2007, n° 06-41 212 ) ;
- Parce que l’hôtel situé en station de ski est vide en l’absence de neige (Cass. soc., 15/12/2019 n° 09-42273 ).
Ce dernier exemple est intéressant : l’employeur a recruté des saisonniers à compter du 1er janvier jusqu’à la fin de la saison, avec dix jours d’essai. Faute de neige et de clients il rompt les périodes d’essai au bout de huit jours. “Abusif” estime la Cour de cassation qui condamne l’employeur à verser tous les salaires jusqu’à la fin du contrat, la rupture de la période d’essai devant reposer exclusivement sur des motifs inhérents à la personne du salarié.
La force majeure peut-elle être invoquée ?
À partir du moment où le Gouvernement ouvre sans limite le dispositif d’activité partielle, la rupture du contrat reste un choix pour l’entreprise et non une obligation.
La décision juridiquement correcte dans ce cas serait donc, notamment pour les activités qui doivent fermer, de déclarer les salariés en chômage partiel.
Le report de la période d’essai
Il est de jurisprudence constante que la période d’essai suppose une appréciation des capacités du salarié et qu’une suspension du contrat de travail reporte la période d’essai à la fin de la période de suspension.
Les périodes d’essai seront donc décalées pour tous les salariés placés en activité partielle avant la fin de l’essai. Mais attention, lorsque la période d’essai reprendra, seule une décision basée sur les capacités professionnelles du salarié permettra une éventuelle rupture.
Jean-Pierre Willems
Chargé d’enseignement politiques droit et pratiques de formation - master DRH @ Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne
Consultant @ Willems Consultant
Consulter la fiche dans l‘annuaire
Parcours
Chargé d’enseignement politiques droit et pratiques de formation - master DRH
Consultant
Responsable du master RH
Partenaire
Établissement & diplôme
DESS Gestion du personnel - Droit (Michel Despax)
Fiche n° 24709, créée le 10/08/2017 à 15:40 - MàJ le 20/11/2024 à 12:42