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DEI : « Les entreprises ont un rôle social et l’assument » (Benoît Serre, ANDRH)

News Tank RH - Paris - Interview n°387509 - Publié le
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©  D.R.
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« La marche arrière en matière de politique DEI Diversité, Équité, Inclusion opérée par plusieurs grandes entreprises américaines s’appuie sur une confusion selon laquelle la politique en faveur de la diversité et l’inclusion s’apparenterait à du wokisme. Cela n’a rien à voir. La recherche de diversité, dans une entreprise, n’est en rien du militantisme. Elle consiste juste à respecter la liberté individuelle des personnes, leurs origines sociales et géographiques, leurs orientations diverses, pour les intégrer dans un espace de travail commun en corrigeant certaines phénomènes sociaux ou sociétaux », déclare Benoît Serre Partner & director HR - People strategy @ Boston Consulting Group (BCG) • Vice-président puis vice-président national délégué @ Association nationale des directeurs des ressources humaines (ANDRH)
, vice-président délégué de l’ANDRH • Association loi 1901 au service des professionnels des ressources humaines représentant les entreprises et organisations de tous secteurs d’activité et de toutes tailles, publiques et privées… , à News Tank le 13/02/2025.

Julie Sweet, CEO Chief Executive Officer d’Accenture • Société immatriculée à Dublin (Irlande) où se trouve son siège social depuis 2009 et cotée à New York (États-Unis). • Création : 1989 (issue d’une scission avec le cabinet américain Arthur… , a envoyé une note interne à ses filiales sur la politique DEI de l’entreprise pour se « conformer » aux décrets publiés sur le sujet par Donald Trump depuis son élection à la présidence des États-Unis, comme révélé par News Tank le 11/02/2025. D’autres entreprises américaines, comme Walmart, Ford, Disney, McDonald’s, Meta ou Google, ont annoncé un renoncement partiel ou total à leur politique DEI.

« Le cadre légal européen prévoit certaines obligations pour les entreprises en matière d’inclusion et de respect de la diversité. Il nous protège donc en partie d’une telle dérive. N’oublions pas non plus que la diversité est un vecteur puissant d’engagement, de fidélisation et d’attractivité. Autant d’éléments que les entreprises qui souhaitent embaucher ne peuvent pas ignorer, surtout dans un contexte de tension du marché du travail. »

« Ne laissons pas s’installer cette petite musique désagréable, et réaffirmons le rôle intégrateur et structurant des entreprises dans la société. Les entreprises ont un rôle social et l’assument. Si ce n’est par conviction, au moins par pragmatisme. »


Benoît Serre répond aux questions de News Tank

Comment analysez-vous le phénomène de renoncement partiel ou total d’entreprises comme Accenture, Walmart, Ford, Disney, McDonald’s, Meta ou Google, à leur politique DEI ?

Cette tendance, très liée d’abord à la configuration politique américaine et partiellement à sa culture américaine communautaire, s’appuie sur une confusion selon laquelle la politique en faveur de la diversité et l’inclusion s’apparenterait à du wokisme. Ça n’a rien à voir. La recherche de diversité, dans une entreprise, n’est en rien du militantisme. Elle consiste juste à respecter la liberté individuelle des personnes, leurs origines sociales et géographiques, leurs orientations diverses, pour les intégrer dans un espace de travail commun en corrigeant certaines phénomènes sociaux ou sociétaux. Une entreprise dont la démarche est d’intégrer chacun, quelle que soit son identité, fait tout simplement preuve d’humanisme, une avancée forte qu’il serait dangereux de remettre en question.

Les initiatives prises dans les entreprises en matière de diversité doivent rester vivaces. Il nous faut le réaffirmer, car la confusion qui s’installe aux États-Unis pourrait pousser des organisations à abandonner toute responsabilité sociale. Certains patrons américains semblent souhaiter un retour à un modèle d’entreprise centré uniquement sur la profitabilité économique. C’est un recul dangereux.

Pourquoi ce recul est-il dangereux ?

L’entreprise est un objet social. Elle a donc une responsabilité sociale. »

L’État français, compte tenu de sa situation budgétaire notamment, a de fait transféré peu à peu aux organisations des missions de solidarité ou de santé qu’il assume moins ou qu’il n’assume plus. Les entreprises prennent donc le relais sur certaines de ces missions : prévention santé, accompagnement des aidants, engagement associatif. Cela affirme le rôle social et sociétal croissant que les entreprises entendent assumer. L’entreprise est un objet social. Elle a donc une responsabilité sociale.

J’ajoute que la diversité présente des avantages indéniables et démontrés en matière d’intelligence collective, de créativité, et donc de performance. Les entreprises ont donc, au-delà des considérations humanistes, tout intérêt à développer une politique DEI vertueuse.

Le phénomène peut-il s’imposer en France ?

Le cadre légal européen prévoit certaines obligations pour les entreprises en matière d’inclusion et de respect de la diversité. Il nous protège donc en partie d’une telle dérive. N’oublions pas non plus que la diversité est un vecteur puissant d’engagement, de fidélisation et d’attractivité. Autant d’éléments que les entreprises qui souhaitent embaucher ne peuvent pas ignorer, surtout dans un contexte de tension du marché du travail.

Cela ne signifie pas pour autant que le risque n’existe pas »

Au-delà du cadre réglementaire ou de la nécessité économique, l’inclusion et la diversité sont des convictions désormais ancrées chez les dirigeants d’entreprise en France. D’ailleurs, Je n’observe pas, dans les entreprises françaises ou dans les filiales françaises de groupes américains, l’émergence d’un phénomène similaire à ce qui existe aux États-Unis. Cela ne signifie pas pour autant que le risque n’existe pas. Je le répète, la confusion entre diversité et wokisme pourrait répandre une idée fausse, selon laquelle l’inclusion serait un acte militant.

Ne laissons pas s’installer cette petite musique désagréable, et réaffirmons le rôle intégrateur et structurant des entreprises dans la société. Les entreprises ont un rôle social. Elles doivent l’assumer, si ce n’est par conviction, au moins par pragmatisme.

Le risque n’est-il pas de voir certaines entreprises afficher afficher une façade socialement consciente, sans initiative concrète en faveur de la diversité ?

C’est une dérive possible, mais la multiplicité des sites d’évaluation des entreprises comme Glassdoor, et la vigilance exigeante des salariés eux-mêmes, fait que ceux qui trichent sont très vite démasqués. Le « diversity washing » se voit autant que le « green washing ».

Benoît Serre


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Boston Consulting Group (BCG)
Partner & director HR - People strategy
Association nationale des directeurs des ressources humaines (ANDRH)
Vice-président puis vice-président national délégué
Excelia Group
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L’Oréal
DRH France
Boston Consulting Group (BCG)
Partner / Associate Director
Macif
Directeur général adjoint - Directeur des Ressources Humaines et de la Communication
Macif
Directeur des Ressources Humaines Groupe
Leroy Merlin Groupe ADEO
DRH en Russie
Leroy Merlin
Directeur Université d’entreprise
Groupe IGS HR Consultancy and Training
CEO
Maison des Collectivités locales (Ernst&Young Group)
Director

Fiche n° 25040, créée le 29/08/2017 à 12:43 - MàJ le 12/02/2025 à 17:44

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