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L’âge du capitaine (Benoît Serre, ANDRH)

News Tank RH - Paris - Analyse n°311892 - Publié le 15/01/2024 à 15:01
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 Benoît Serre vice-président délégué de l’ANDRH - © DR.

Il est pour le moins paradoxal, alors que les débats autour de l’emploi des seniors font une incursion récurrente dans l’actualité et les négociations sociales actuelles, que nous démarrions 2024 avec le plus jeune président de la République nommant le plus jeune Premier ministre de notre histoire. Dès l’annonce faite, les débats sur la confrontation de l’âge et de l’expérience ont renvoyé à des questions qui se posent aussi en entreprise, depuis fort longtemps. Combien de jeunes candidats s’estiment floués par des annonces de postes de juniors demandant 5 ans d’expérience ? Combien de personnes se voient refuser un poste parce que selon la formule consacrée « vous êtes trop expérimenté pour ce poste, vous vous y ennuierez » ? Il en va de même pour ces collaborateurs à qui on va refuser un poste de manager parce qu’ils n’ont jamais managé ou ces seniors auxquels on refuse une responsabilité d’expertise parce que leur expérience est majoritairement managériale.

Une analyse de Benoît Serre vice-président délégué de l’ANDRH Association nationale des directeurs des ressources humaines , pour News Tank.


L'âge et le diplômes ou l’expérience acquise et les résultats ?

Chacun connaît la célèbre formule du Cid affirmant que « la valeur n’attend point le nombre des années » que nous avons d’ailleurs entendue tant de fois depuis la nomination de Gabriel Attal Premier ministre @ Chef du Gouvernement - Hôtel de Matignon
omettant au passage le début du vers « aux âmes bien nées » qui pourtant lui en donne toute sa justification.

Au sein des entreprises ces questions se posent notamment dans notre pays où la valeur du diplôme a un poids et une durabilité exceptionnelle par rapport à d’autres marchés du travail qui vont davantage valoriser l’expérience acquise et les résultats obtenus. De même, on peut avoir le sentiment que le début de carrière structure dans bien des cas la suite et qu’un « mauvais départ » ne se rattrape que rarement.

Sur un plan social, cette problématique est adressée notamment via les efforts d’intégration de publics différents avec la vraie volonté de certaines organisations de donner une chance à celles et ceux qui en ont eu moins au départ, pour des raisons diverses, et plus souvent dues au hasard qu’à autre chose. 

La manière d'être plutôt que l'âge

Cela étant, deux éléments devraient structurer ou à tout le moins influencer toute nomination ou recrutement : ce sont les circonstances et l’environnement. Certaines personnalités sont faites pour les crises et d’autres pour les temps calmes. Pas plus que la formation initiale, ce ne devrait être l’âge qui détermine la qualité d’un individu et son adaptation aux responsabilités qui lui sont confiées mais sa manière d’être. À l’heure où l’importance des « soft skills » se fait grandissante, il est étonnant de continuer à donner à l’âge une telle importance. Appliquer ce critère revient à considérer qu’à chaque âge correspondent des caractéristiques semblables ou tout au moins particulières et communes qui dominent la personnalité ou la capacité d’un individu.

Associer l’âge à des vertus et des défauts prédéterminés caricature et catégorise : aux jeunes l’énergie et aux plus âgés la sagesse.

L’expérience joue son rôle mais il faut parfois admettre qu’elle peut être contre-productive dans certaines circonstances car chacun peut avoir tendance à reproduire ce qu’il connaît alors même que son environnement de travail ou de projet réclame au contraire de s’en défaire puisque souvent le même acte produit le même effet.

Nommer un jeune à l’innovation n’est en rien une garantie et c’est pourtant fréquent en partant du principe que son âge comme son énergie mais surtout son inexpérience - presque son ignorance - le pousseront mécaniquement à être inventif. 

La curiosité devrait pourtant être le principal critère et elle ne repose pas sur l’âge. De même, pour une mission complexe on va souvent préférer un candidat expérimenté en pariant sur le fait que cette qualité apportera nécessairement recul et méthode alors même qu’elle peut parfois conduire au contraire à scléroser la réflexion autour du redoutable « j’ai toujours fait comme cela ».

Un conflit générationnel qui n’existe pas

Il résulte de cette obsession de l’âge comme déterminant de professionnalisme ou de savoirs l’orchestration d’un conflit générationnel qui n’existe pas. Il y a un sujet de cohabitation des générations dans nos organisations comme dans la vie en société mais ce n’est pas un conflit. On a vu de jeunes capitaines trouver les moyens et l’inventivité pour faire travailler et produire dans une logique collective de complémentarité et non de comparaison et de concurrence. Et l’on voit de vieux capitaines confondre leur expérience avec leur légitimité. Car c’est sur ce dernier point que le regard doit porter lorsqu’on nomme à des responsabilités managériales ou de décision.

L’individu est il légitime aux yeux de son environnement humain et professionnel ? Car de cette qualité qui ne peut lui être reconnue que par ses équipes et l’externe dépend son autorité et sa capacité d’action.

Dans l’âge du capitaine, l’important n’est pas l’âge mais le capitaine !

Benoît Serre


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Boston Consulting Group (BCG)
Partner & director HR - People strategy
Association nationale des directeurs des ressources humaines (ANDRH)
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Fiche n° 25040, créée le 29/08/2017 à 12:43 - MàJ le 22/04/2024 à 15:58

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 Benoît Serre vice-président délégué de l’ANDRH - © DR.