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Questions/Réponses « employeur » sur le déconfinement : les réponses de Laurent Jammet (Actance)

News Tank RH - Paris - Analyse n°182295 - Publié le 05/05/2020 à 14:56
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« La première étape pour l’employeur, avant la reprise de l’activité, est la consultation des représentants du personnel », déclare Laurent Jammet Avocat associé - Conseil en droit social @ Actance
, avocat associé au sein du cabinet Actance • Activité dédiée au droit social au travers de prestations de conseils aux entreprises et d’assistance en matière judiciaire • Création : 2005 • Expérience dans le traitement et la gestion des… , dans un entretien avec News Tank le 04/05/2020.

« En parallèle, l’employeur peut mener, si le climat social le permet, des négociations avec les organisations syndicales les modalités de reprise de l’activité, afin de légitimer les mesures de prévention prises ».

« L’employeur doit actualiser le DUER Document unique d’évaluation des risques avec toutes les mesures de prévention qu’il compte mettre en œuvre pour assurer la sécurité des salariés lors de la reprise, et le soumettre à l’avis consultatif du CSE Comité social et économique  ».

« Les salariés doivent être informés de la modification du règlement intérieur dans les conditions légales ».

« Même s’il n’existe pas d’obligation absolue de respecter le protocole national sur le déconfinement, il est fortement conseillé aux employeurs de le suivre. »

« Lorsque le poste de travail ou l’outil de production change à cause des mesures de prévention mises en place, l’employeur a l’obligation de former les salariés concernés pour les adapter aux mesures Covid-19 ».


Que doit faire l’employeur avant et pendant la reprise de l’activité ?

La consultation des IRP

La première étape pour l’employeur est la consultation des représentants du personnel »

La première étape pour l’employeur est la consultation des représentants du personnel, le CSE Comité social et économique pour les grandes entreprises, grâce aux moyens précisés par le gouvernement, à savoir la visioconférence, la conférence téléphonique et la messagerie instantanée lorsqu’une réunion physique ne peut pas être organisée.

En cas de conférence téléphonique, l’employeur doit impérativement recueillir la preuve de l’avis de chacun des élus. Il est donc conseillé à l’employeur de faire une visioconférence au moment du vote de chaque élu, d’autant plus que le vote sur le déconfinement n’a pas de caractère secret.

L’employeur doit seulement consulter les IRP Instances Représentatives du Personnel . Il n’a pas à obtenir un accord formel pour procéder à la reprise d’activité de l’entreprise, tant qu’il respecte la procédure de consultation et qu’il a remis l’information suffisante. Il s’agit seulement d’un avis consultatif du CSE.

En l’absence de représentants du personnel, pour les petites entreprises, l’employeur est garant de la sécurité dans l’entreprise et des mesures prises. Il n’a donc pas à suivre de procédure particulière, si ce n’est l’information du personnel des mesures de prévention mises en place.

La négociation avec les organisations syndicales

En parallèle de la consultation des IRP, il est possible, et conseillé si le climat social le permet, de mener des négociations avec les organisations syndicales sur les modalités de reprise de l’activité.

L’employeur peut organiser des négociations avec les syndicats pour légitimer les mesures prises »

Ces négociations permettent de légitimer les mesures qui seront prises vis-à-vis du personnel, car elles seront prises d’un commun accord entre l’employeur et les syndicats représentatifs au sein de l’entreprise.

En cas d’accord avec les organisations syndicales sur les mesures à mettre en œuvre, l’employeur n’aura pas à consulter le CSE avant de signer l’accord. Néanmoins, il devra consulter le CSE avant la mise en œuvre effective des mesures décidées.

L’actualisation du DUER

L’employeur doit actualiser le DUER avec toutes les mesures de prévention qu’il compte mettre en œuvre pour assurer la sécurité des salariés lors de la reprise.

Dans le cadre de sa consultation avec des IRP, l’employeur devra ainsi obtenir l’avis du CSE sur l’actualisation du DUER, ce qu’a rappelé la Cour d’appel de Versailles à la société Amazon. C’est un enjeu essentiel.

L’avis du CSE n’est pas liant pour l’employeur, il est uniquement consultatif.

Le DUER devra notamment contenir la procédure à suivre en cas de salarié présentant les symptômes du Covid-19 : il faut notamment isoler immédiatement la personne des autres salariés, l’orienter vers les services médicaux adéquats, signaler le cas à l'éventuelle cellule de crise etc. Une procédure doit donc être formalisée pour que tout puisse être parfaitement organisé en cas de survenance d’un tel évènement. Ne pas établir cette procédure pourrait être considéré comme une faute de l’employeur.

Le DUER précisera les modalités relatives à la décontamination périodique des locaux, à la gestion des flux des salariés etc. »

Le DUER précisera les modalités relatives à la décontamination périodique des locaux, à la mise à disposition des équipements de protection individuelle, à la gestion des flux des salariés et des prestataires ou clients, à la mise en place des mesures de distanciation, notamment dans les open space etc.

Il est conseillé aux employeurs d’avoir recours à des schémas imagés ou des documents didactiques afin de faciliter la compréhension des process aux salariés.

À partir du moment où l’employeur met en place toutes les mesures de prévention, les salariés sont obligés de retourner sur leur lieu de travail et ne peuvent plus invoquer un éventuel droit de retrait.

La modification du règlement intérieur

Le règlement intérieur reprend un certain nombre de règles en matière d’hygiène et de sécurité. Si l’employeur met en place de nouvelles règles d’hygiène et de sécurité et modifie les précédentes, il devra actualiser le règlement intérieur.

Par exemple, les mesures de prévention relatives au sens de circulation dans les bureaux, aux ascenseurs, aux parkings etc, qui n’existaient pas avant la reprise de l’activité, devront figurer dans le règlement intérieur.

Les salariés doivent être informés de la modification du règlement intérieur de la manière la plus claire possible »

Les salariés doivent être informés de la modification du règlement intérieur dans les conditions légales. Il est recommandé de compléter cette information par une complémentaire qui doit être la plus claire possible afin d’être opposable à tous les salariés, afin que ceux-ci respectent entièrement les nouvelles mesures.

L’information peut se faire par mail, sous forme d’affichage dans les locaux, de vidéos, de podcasts, de communications intranet : tous les moyens de communication de l’entreprise doivent être utilisés !

Il est conseillé aux employeurs d’avoir une politique de communication de l’entreprise irréprochable. Celle-ci est d’ailleurs soumise à la consultation du CSE.

Le respect des consignes du ministère du Travail

Le protocole  Publié le 03/05/2020 à 19:27
PDF - 849,20 Ko
 de déconfinement publié par le ministère du Travail est un recueil de bonnes pratiques. Il regroupe le minimum des consignes que doit respecter un employeur.

Si un employeur ne respecte pas ces consignes, sauf s’il démontre que celles qu’il a mises en place sont plus importantes que celles préconisées par le ministère, il risque la saisine du juge par les organisations syndicales ou les salariés, comme l’ont fait les syndicats d’Amazon ou de Carrefour.

La faute inexcusable de l’employeur peut être retenue s’il ne respecte pas les consignes gouvernementales »

Il risque également, en cas de salarié contaminé par le Covid-19 sur son lieu de travail, de voir sa faute inexcusable retenue par les juges au motif qu’il n’aurait pas respecté les préconisations gouvernementales lors de la reprise.

Ainsi, même s’il n’existe pas d’obligations absolues de respecter le protocole publié, il est fortement conseillé aux employeurs de le suivre.

La formation de certains salariés

Pour les salariés dont le travail serait réellement impacté par la mise en place des procédures de préventions, comme dans l’industrie par exemple, l’employeur devra les former aux mesures de prévention, notamment grâce à un référent Covid-19.

Lorsque le poste de travail ou l’outil de production change à cause des mesures de prévention mises en place, l’employeur a l’obligation de former les salariés concernés pour les adapter aux mesures Covid-19 et leur faire appréhender les nouvelles conditions de travail. Cette formation peut être assurée par le ou les référents Covid-19, qui connaîtront déjà toutes les procédures dans l’entreprise.

Un changement d’organisation du travail entraîne la formation préalable des salariés concernés »

Cette formation fait partie du respect de l’obligation de sécurité de l’employeur. Un changement d’organisation du travail, qui entraîne de nouveaux risques, entraîne nécessairement la formation préalable des salariés concernés.

Que peut faire, ou ne peut pas faire, l’employeur pendant la reprise d’activité ?

La prise de température

À l’origine, dans les premiers documents “questions/réponses” publiés par le ministère du Travail, il était admis, sur la base de la préconisation du ministère des Solidarités et de la Santé, de faire des relevés de température réguliers des salariés.

Aujourd’hui, dans le protocole national, cela n’est plus du tout recommandé.

Certaines organisations syndicales sont pour la prise de température obligatoire alors que d’autres non.

La prise de température sur la base du volontariat est possible »

La solution la plus satisfaisante est que l’employeur mette à disposition des salariés des thermomètres afin de leur permettre de relever leur température de manière périodique sur la base du volontariat. Ce qui est sûr, c’est que l’employeur ne peut pas recenser les salariés contaminés ou potentiellement contaminés dans un fichier. C’est une atteinte aux dispositions du RGPD Règlement général sur la protection des données (réglementation européenne entrée en vigueur le 25/05/2018) . L’employeur n’a pas à savoir si un salarié est contaminé ou non, puisque ce sont des informations soumises au secret professionnel médical.

Si un salarié donne cette information de manière volontaire, l’employeur ne peut pas la conserver ou l’utiliser mais il pourra toutefois, en lien avec la médecine du travail, informer les autres salariés l’ayant côtoyé afin de prendre des mesures d’isolement.

La mise en place d’un référent Covid-19

Le référent covid-19 doit être formé pour répondre aux interrogations des salariés »

Il est conseillé aux entreprises de mettre en place un référent Covid-19 au sein de l’entreprise. Ce référent devra être formé à toutes les mesures de prévention et les procédures mises en place au sein de l’entreprise, afin de pouvoir répondre aux interrogations des salariés.

Le référent doit exercer en coopération étroite avec les services de santé de l’entreprise et la Direction. Le CSE peut également désigner son propre référent.

La mise en place d’une cellule psychologique

La cellule psychologique est utile, notamment pour les télétravailleurs, qui vont continuer à travailler de chez eux. Le Covid-19 a permis de se rendre compte que le télétravail peut être difficile pour les personnes qui n’en ont pas l’habitude.

Le télétravail étant favorisé jusqu’à la fin de l’été, beaucoup de travailleurs vont continuer à travailler cinq jours sur cinq chez eux, avec leurs enfants et leur conjoint, pour certains dans des logements exigus.

La cellule psychologique est un moyen d'éviter le burn-out des télétravailleurs »

La cellule psychologique peut être un moyen d’éviter le burn-out des télétravailleurs.

Elle peut être utile également pour rassurer les salariés qui doivent revenir en entreprise et qui ont peur d’être contaminés.

L’employeur peut-il choisir les salariés devant retourner sur le lieu de travail ?

En pratique, en cas de reprise partielle de l’activité, l’employeur peut interroger les salariés afin de connaître ceux pouvant retourner au travail ou ceux empêchés pour des arrêts de travail ou de garde d’enfants. Cette première étape permet aux opérationnels d’établir une liste des salariés pouvant revenir travailler en présentiel.

Ensuite, les opérationnels peuvent choisir entre les salariés volontaires et les salariés non volontaires, afin d’établir une organisation de travail. En cas d’insuffisance de volontaires, l’employeur peut imposer un retour sur le lieu de travail lorsque cela est nécessaire à son bon fonctionnement.

L’employeur ne peut pas tenir compte de l'âge ou de l'état de santé pour le retour sur le lieu de travail »

Cependant, l’employeur ne peut pas tenir compte de l’âge ou de l’état de santé d’un salarié pour décider de son retour ou non dans l’entreprise. Cela est discriminatoire. Par exemple, l’employeur ne peut pas refuser le retour au travail volontaire d’un salarié de soixante ans.

La reprise des élections professionnelles

Avec la reprise de l’activité, et à la fin programmée de l'état d’urgence sanitaire, les élections professionnelles, suspendues jusqu’à maintenant, vont pouvoir se dérouler à nouveau.

Le recours au vote électronique devra être privilégié »

Il est conseillé aux employeurs, en concertation avec les partenaires sociaux, de privilégier le recours au vote électronique, pour les salariés en télétravail mais également pour les salariés en présentiel.

L’employeur peut recourir à un prestataire extérieur pour organiser ce vote électronique.

Laurent Jammet

Email : jammet@actanceavocats.com

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Parcours

Actance
Avocat associé - Conseil en droit social
Cabinet Jacques Barthélémy et Associés
Avocat associé - Conseil en droit social

Établissement & diplôme

Université de Montpellier
Master 2 DPRT et DEA Droit Privé

Fiche n° 25201, créée le 31/08/2017 à 08:07 - MàJ le 03/06/2020 à 10:16

Actance

• Activité dédiée au droit social au travers de prestations de conseils aux entreprises et d’assistance en matière judiciaire
Création : 2005
• Expérience dans le traitement et la gestion des contentieux, notamment les contentieux à risques et de droit pénal du travail
• Partenaire de grandes entreprises et de groupes de dimension nationale et internationale (dont de nombreux groupes cotés) et de PME.
• Secteurs d’intervention variés : banque, assurance, diverses industries dont la pharmacie, automobile, chimie, publicité, médias.
Effectif : plus de 50 avocats en droit social
Contact
Tél. : 01 44 94 96 00


Catégorie : Cabinets d'Avocats


Adresse du siège

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Fiche n° 5740, créée le 07/09/2017 à 05:37 - MàJ le 24/10/2019 à 15:06