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UHFP : « Nous prônons le lancement d’une négociation dédiée au PDC » (Estelle Sauvat, Groupe Alpha)

News Tank RH - Paris - Actualité n°278572 - Publié le 31/01/2023 à 19:35
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Estelle Sauvat - ©  D.R.

« À l’heure d’une refonte de la formation professionnelle, l’entreprise est la grande absente des réflexions. La réforme systémique que nous appelions de nos vœux, sera plutôt paramétrique. Elle porterait essentiellement sur la modification des paramètres financiers et de construction de la formation professionnelle, sans englober le PDC Plan de développement des compétences  », déclare Estelle Sauvat Directrice générale @ Groupe Alpha et Secafi
• Née le 14/11/1974 • Elle a co-écrit avec Bertrand Martinot, pour l’Institut Montaigne, une étude intitulée « Un capital emploi formation pour tous …
, directrice générale du Groupe Alpha et ancien haut-commissaire à la transformation des compétences, lors de l’atelier relatif au « PDC, au service de la croissance des entreprises », le 26/01/2023, dans le cadre de l’UHFP Université d’hiver de la formation professionnelle (Université d’hiver de la formation professionnelle) organisée à Cannes par Centre Inffo Centre d’information et de documentation sur la formation permanente .

« Nous prônons le lancement d’une négociation dédiée au PDC, afin de transformer certaines logiques. Précisément, faire ce qu’on a fait pour le CPF Compte Personnel de Formation , c’est-à-dire introduire la question de l’investissement comme un modèle central en mesurant ce que doit être un capital immatériel, un investissement traduit dans une cartographie d’emplois. Et redonner au PDC son rôle central d’outil d’aide à la décision. »

« L’entreprise doit définir, sur un temps de négociation, les enjeux stratégiques de demain tout en déterminant les volumes d’investissement en termes d’impact, d’abondement du CPF et de recentrer de manière plus large sa part d’investissement dans la formation. Les aides ponctuelles de l'État (15 Md€) ne suffiront pas à laisser la France compétitive sur le long terme. »


« L’investissement en formation n’est pas un investissement de même nature que les autres investissements » (Jean-Pierre Willems)

Jean-Pierre Willems - ©  D.R.

  • « Le PDC est le parent pauvre de la réforme de 2014. Le diagnostic du système de formation pénalisait les entreprises lorsqu’il était jugé inefficace ou d’une efficacité insuffisante en raison de l’absence de concentration des moyens financiers vers les jeunes via l’apprentissage, et les équipements des salariés par exemple. Il a donc été décidé de prioriser la formation, sur un principe qui apparaît a posteriori un peu faux, celui de la responsabilité du chef d’entreprise. Dans le cadre de la stratégie d’entreprise, l’employeur exerce ainsi sa responsabilité. Or, en l’espèce, ce principe est un échec.

    Le savoir expérientiel, qui prime sur le savoir formalisé externe, entraîne des taux faibles de formation »

  • L’investissement en formation n’est pas un investissement de même nature que les autres investissements. Investir dans la formation, c’est le faire dans les compétences qui appartiennent aux individus. Ainsi, lorsque l’employeur investit dans les compétences, cela suppose que les salariés les acquièrent, qu’ils restent ensuite dans l’entreprise et qu’ils acceptent de bien les mettre en œuvre.
  • En raison d’un turnover massif, l’hôtellerie-restauration est le secteur qui forme le moins ses salariés (20 %), soit un collaborateur sur cinq qui part en formation chaque année. Le savoir expérientiel, qui prime sur le savoir formalisé externe, entraîne des taux faibles de formation. La notion d’investissement formation, reposant sur la responsabilité du chef d’entreprise, n’est ainsi pas adaptée et ne permet pas de générer des pratiques d’investissement. Nous devons par conséquent l’envisager autrement.
  • Quelle est la part de l’investissement qui doit reposer sur :
    • L’entreprise parce qu’elle est utilisatrice de compétences ;
    • L’individu parce qu’il accroît son capital et sa valeur sur le marché du travail ;
    • La ou les collectivités en raison de l’intérêt général.
  • Se pose ainsi la question de la répartition, c’est-à-dire savoir comment on équilibre cet effort puisqu’il profitera successivement à tous ou à plusieurs ? La mutualisation et la fiscalisation ont permis d’y répondre. Certaines branches continuent la mutualisation par une contribution conventionnelle. Les artisans et les professions libérales étaient les premières branches à instaurer cette contribution.

Nous n’avons pas trouvé de relais à ce jour à des formes de financement de l’investissement mutualisé qui ne passent pas par la loi.

  • Les partenaires sociaux n’ont pu se mettre d’accord (Medef, CFDT Confédération française démocratique du travail étaient favorables à une contribution conventionnelle de 2 %, répartie entre l’employeur (1,8 %) et les salariés (0,2 %) et la CPME Confédération des Petites et Moyennes Entreprises et les autres syndicats y étaient opposés). Ce désaccord a rendu possible la réforme de 2018, avec une reprise en main du dispositif par l'État. »

    Jean-Pierre Willems Chargé d’enseignement politiques droit et pratiques de formation - master DRH @ Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne • Consultant @ Willems Consultant
    , consultant indépendant

Plan de compétences : « C’est moins de 3 % des négociations collectives » (Estelle Sauvat)

Estelle Sauvat - ©  D.R.

  • « On prend le risque que l’entreprise délaisse le PDC au profit du CPF. Se pose la question de la soutenabilité du financement de ce dernier. Actuellement, les dépenses s'élèvent à 16 Md€ contre 10 Md€ de collectes, mais, dans les prochaines années, les déficits seront colossaux.
Le PDC est devenu un simple plan de formation »
  • Au-delà des compétences, les différentes crises (économique, sanitaire, énergétique, inflation) poussent les salariés, en quête de sens, à vouloir travailler autrement. Or, les problématiques d’organisation du travail se mêlent difficilement à l’acquisition des compétences. Ainsi, l’investissement formation, et notamment sa traduction dans le plan stratégique de l’entreprise, apparaît essentiel, sauf que le PDC est devenu un simple plan de formation, sous forme de catalogue.

L’enjeu, à poser dans le futur projet de loi plein emploi, est de trouver les conditions pour installer le plan de développement des compétences comme l’enjeu de la décennie qui vient pour le compte des entreprises.

  • Dans le cadre de la réforme des retraites, l’index senior prendra une place déterminante dans toutes les négociations dans les prochains mois et les prochaines années. L’index égalité femmes-hommes représente six fois plus de négociations dans l’entreprise que ce qui se joue dans la formation professionnelle. Le PDC, c’est moins de 3 % des négociations collectives dans les entreprises. »

Faire de l’investissement dans les compétences un sujet central de négociation est une solution intelligente prise collectivement pour répondre aux paradoxes qui sont les nôtres en matière de recrutement et de développement des compétences.

Estelle Sauvat, directrice générale du Groupe Alpha et ancien haut-commissaire à la transformation des compétences

Électromécanique : « Vers une nouvelle spécialité afin d’ouvrir une perspective et de répondre à un besoin de l’entreprise » (Arnaud Mottard)

Arnaud Mottard - ©  LinkedIn

  • « Au sein de Suez, nous avons pris le parti il y a quatre ou cinq ans d’arrêter le PDC parce que nous avions considéré que recenser au mois de juillet, dans un tableau Excel, toutes les formations que nous n’allions pas faire dans l’année n’avait pas beaucoup de sens. Le pilotage du déploiement du nouveau SI Système d’information a ainsi été une opportunité pour le groupe de revoir sa stratégie en matière de formation professionnelle.
  • Nous nous basons sur trois flux pour recenser les formations dans le groupe : 
    • Les formations réglementaires ;
    • Les formations stratégiques :
      • Accompagnement en matière de transformation des métiers ;
      • Accompagnement des nouveaux outils ;
      • Accompagnement aux nouvelles organisations, etc. ;
    • Les formations liées à un besoin spécifique des managers et des RH Ressources Humaines opérationnels dans la limite du budget alloué.
  • Ensuite, notre plan de formation fait l’objet de concertations annuelles étroites avec les partenaires sociaux.
  • Dans les métiers de l’eau en général, notamment nous avons de vraies difficultés de recrutement autour du métier d'électromécanicien, et notamment dans les stations d'épuration d’eau. En plus des CQP Certificat de qualification professionnelle proposés par la branche, nous réfléchissons à développer des certifications uniquement sur la compétence d'électromécanique, sans chercher à embrasser l’ensemble du scope. Ceci nous permet de flécher beaucoup de salariés en exploitation et de les orienter vers cette nouvelle spécialité afin d’ouvrir une perspective et répondre à un besoin de l’entreprise. »

Arnaud Mottard Directeur Learning France & Groupe @ Suez
, directeur learning France de SUEZ

« L’enjeu : savoir comment les entreprises doivent préparer l’avenir dans une pénurie d’emploi importante » (Philippe Bonnin)

Philippe Bonnin - ©  D.R.

  • « Nous avons appréhendé certaines transformations méthodologiques et fonctionnelles autour des métiers comptables qui sont fortement impactés par la digitalisation et le développement de l’intelligence artificielle dans les services fiscaux notamment. La profession s’inquiète de la généralisation des déclarations en ligne, entraînant une redéfinition des missions. Se pose ainsi la question de l’adaptation des plans de formation et des certifications. 
  • Le modèle économique des entreprises depuis 30 ans s’accélère. La difficulté actuelle est de corriger l’obsolescence des compétences, c’est-à-dire corriger les compétences des salariés pour être opérationnels immédiatement. L’enjeu qui s’ouvre à nous est de savoir comment les entreprises doivent-elles préparer l’avenir dans une pénurie d’emploi importante ? Il y a un réel problème d’anticipation.

    Certains coûts de formation peuvent s’immobiliser »

  •  Dans les Comex Comité exécutif et Codir Comité de direction , l’investissement formation est considérée comme une dépense. Pourtant, certains coûts de formation peuvent s’immobiliser. Par exemple, si l’entreprise achète un nouveau matériel, cet outil suppose que le salarié soit formé à son utilisation. Ces coûts de formation pour l’utilisation de ce matériel sont inscrits à l’actif du bilan comptable de l’entreprise, considérant que cela fait partie de cette future création de valeur générée grâce à l’utilisation de la machine. La lecture de cette dépense de formation est considérée comme un accessoire (la formation) au principal (la machine). 
  • Si demain, le PDC devenait un actif principal. L’entreprise pourrait, dans le respect de la norme comptable, considérer qu’elle a capitalisé et obtenu un retour sur investissement de la formation. Cela suppose donc de définir ce retour sur investissement, à savoir la création de valeur pour l’entreprise ou pour les collaborateurs qui fera que l’entreprise aura les développements. »

Pour mémoire, en janvier 2020, l’autorité des normes comptables avait publié un règlement proposant l’inscription sur option en immobilisation des frais de formations relatifs à la mise en service d’une immobilisation. Ainsi, la dépense de formation liée à un investissement matériel peut être amortie sur plusieurs années.

  • « Les normes européennes sur le CSRD (Corporate Sustainability Reporting Directive, une directive européenne signée le 21/06/2022), sur la durabilité et l’investissement RSE Responsabilité sociétale et environnementale , nous incitent à revoir l’ensemble des critères et des référentiels comptables pour présenter ces investissements dans les entreprises. »

Dans le même esprit, il faudra demain identifier les critères permettant aux entreprises de capitaliser les investissements qu’elles feront dans le PDC. Cela existe depuis longtemps dans le domaine de la R&D Recherche et Développement . Ainsi, nous devrions avoir une réflexion sur ce sujet concernant le PDC.

Philippe Bonnin Directeur général @ Sémaphores (Groupe Alpha) • Membre du Bureau @ Conseil régional de l’Ordre des experts-comptables de Paris-IDF • Président @ Comité ETI et PME de croissance au Conseil de l’Ordre… , directeur général de Sémaphores


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