« Nous craignons la fermeture de CFA en Seine-Saint-Denis » (Danielle Dubrac, présidente de la CCI 93)
« Nous sommes déçus que les CCI
Chambre(s) de Commerce et d’Industrie
ne siègent pas au CA
chiffre d’affaires
de France compétences. Le transfert de la collecte de la taxe d’apprentissage aux Urssaf
Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales
casse un outil qui marchait très bien, avec très peu de frais de gestion et qui réalisait un travail remarquable », déclare Danielle Dubrac
Présidente @ UNIS • Présidente @ CCI Seine-Saint-Denis • Conseiller « Groupe des entreprises » au nom de CCI France @ Conseil économique, social et environnemental (Cese) • Présidente de la…
, présidente de la CCI Seine-Saint-Denis (93) et vice-présidente de la CCI de région Paris Île-de-France, à News Tank, le 20/05/2019.
« Nous craignons que la réforme de la formation de l’apprentissage née de la loi “pour la liberté de choisir son avenir professionnel”, du fait du coût contrat, n’oriente les jeunes vers un CFA
Centre de formation d’apprentis
de branche, dont la pédagogie ne serait pas en capacité d’accueillir des jeunes en pré-apprentissage ou qui ne serait pas en mesure d’accueillir des jeunes en rupture de contrat ».
« Je regrette que les indicateurs de qualité, comme le taux de réussite à l’examen ou un faible taux de rupture, ne soient pas pris en compte dans la définition du coût contrat. »
« Le taux de rupture de la CCIR
Chambre(s) de commerce et d’industrie régionale(s)
dépend des niveaux et des filières. Au total, il représente moins de 9 %. Dans certaines filières, c’est moins de 6 %, alors que la moyenne nationale se situe plutôt entre 21 et 25 %. Ce taux est peu élevé grâce aux efforts que nous faisons en termes d’accompagnement. »
Danielle Dubrac répond aux questions de News Tank
Comment analysez-vous la réforme de l’apprentissage introduite par la loi du 05/09/2018 ?
Nous sommes déçus que les CCI Chambre(s) de Commerce et d’Industrie ne siègent pas au CA chiffre d’affaires de France compétences. Le transfert de la collecte de la taxe d’apprentissage aux Urssaf Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales casse un outil qui marchait très bien, avec très peu de frais de gestion et qui réalisait un travail remarquable : le versement des fonds aux entités désignées était fait dans les temps, par exemple.
Lors de l’enregistrement des contrats d’apprentissage, il y avait 40 % de contrats mal remplis, comportant de petites erreurs »Les CCI ont la capacité de faire de la prospective sur les quelques mois ou années à venir sur plusieurs secteurs. Ne pas nous avoir associés à la gouvernance, au sein de France compétences nous semble regrettable sachant que nous sommes également un organisme de formation. On nous a confondus entre le financeur et l’outil de formation.
Nous n’avons pas été retenus parce qu’il a été considéré qu’une chambre de commerce, malgré un outil de formation efficient, n’était pas un organisme paritaire. Nous disposons aussi d’un Observatoire efficace de la formation, de l’emploi et des métiers (l’OFEM Observatoire de la formation, de l’emploi et des métiers ).
Sur le fond de la réforme, pour le moment, l’entreprise a encore la possibilité de flécher des fonds libres vers le CFA Centre de formation d’apprentis de son choix, de sa filière ou de son territoire. Il faut que cela soit maintenu.
Concernant l’enregistrement des contrats, statistiquement, quand nous le faisions, il y avait 40 % de contrats mal remplis, comportant de petites erreurs, et nous avions l’habitude de nous appuyer sur des personnes qui rappelaient l’entreprise pour sécuriser la situation juridique entre l’apprenti, l’entreprise et le CFA. Nous craignons que la dématérialisation de ces contrats, à travers leur simple dépôt, se fasse au détriment de l’entreprise.
Quelle est votre position sur le coût contrat ? Menace-t-il, selon vous, des sections d’apprentissage et des CFA ? Si oui, lesquels ?
Les plus impactés risquent d’être les CFA de formations transverses, très clairement, c’est-à-dire les formations qui relèvent de plusieurs secteurs d’activité ou de plusieurs branches. Pourtant, ces formations ont un rôle : leurs sections sont remplies et elles répondent à un besoin des entreprises. Si elles ne correspondent plus à ce besoin, nous sommes capables de les fermer d’une année à l’autre.
Et le maintien des formations, malgré les contraintes financières ?
Il est compliqué de les maintenir si vous êtes obligés de licencier du personnel et si vous n’avez plus de formateurs. Nous ne pourrons pas tout maintenir. La réforme a prévu que les branches professionnelles fixent le niveau de prise en charge financière par niveau de diplôme. Il se peut qu’à cause de cette valeur du coût contrat, nous soyons amenés à fermer des formations qui relèvent de l’enseignement supérieur car c’est là où il y a le moins de financement.
En Seine-Saint-Denis, nous craignons la fermeture de CFA »Autre point d’inquiétude : il y a des branches riches et d’autres moins riches. Comme ce sont les branches qui gèrent les coûts et formations, elles peuvent favoriser leurs CFA de branche. Nous craignons donc que les financements ne soient pas assurés pour tout ce qui relève des formations inter CFA ou interbranche, formations transverses, par exemple de la comptabilité ou du middle management, et donc qui ne relèvent pas d’une branche en tant que telle. On peut se demander aussi comment ces branches pourront tenir compte des spécificités territoriales. En Seine-Saint-Denis, il y a peut-être plus de besoins que dans l’Essonne, par exemple.
Nous craignons la fermeture de CFA et l’arrêt des embauches au niveau de l’apprentissage si le coût contrat est trop bas. Nous craignons qu’il y ait une forme de concurrence entre les structures et qu’elle nuise aux territoires.
Comment appréhendez-vous la libéralisation de la création des CFA ?
Je regrette que les indicateurs de qualité, comme le taux de réussite à l’examen ou un faible taux de rupture, ne soient pas pris en compte dans la définition du coût contrat »Nous ne craignons pas trop cette libéralisation. Il y aura des indicateurs de performance, de réussite et de qualité en contrepartie, imposés aux CFA. Nous avons de très bons indicateurs pour nos propres CFA. Je regrette d’ailleurs que les indicateurs de qualité, comme le taux de réussite à l’examen ou un faible taux de rupture, ne soient pas pris en compte dans la définition du coût contrat.
En revanche, nous craignons que la réforme de la formation de l’apprentissage née de la loi « pour la liberté de choisir son avenir professionnel », du fait du coût contrat, n’oriente les jeunes vers un CFA de branche, dont la pédagogie ne serait pas en capacité d’accueillir des jeunes en pré-apprentissage ou qui ne serait pas en mesure d’accueillir des jeunes en rupture de contrat.
Le rôle d’orientation des régions est renforcé par la loi qui leur confie l’information des élèves et des étudiants sur les métiers et les formations. Comment vous positionnez-vous par rapport à ce renforcement ?
Nous avons des conseillers d’orientations, les CIOP Conseillers en information et orientation professionnelle , qui travaillent pour orienter des jeunes, leur faire connaître de nouveaux métiers, mettre en place des mini-stages, par exemple. Nous avons fait 339 interventions en 2017, formé 12 000 jeunes et nous avons eu 1 100 entretiens individuels. Nous organisons des réunions sur les métiers et les formations dans des collèges et des lycées, dans les antennes jeunes (missions locales, maisons de quartiers).
Nous organisons aussi des séances de témoignages d’employeurs, de maîtres d’apprentissage, des visites de CFA, des entretiens individuels, du job dating »Les mini-stages découvertes métiers, sous le label CCI France, permettent à des jeunes, qui ne peuvent pas avoir une convention de stage, d’effectuer un stage en entreprise pour découvrir un métier, un secteur professionnel. Une convention est alors signée entre l’entreprise et le jeune. Le stage se déroule souvent pendant les vacances, pour une durée de 15 jours. Le jeune peut recourir au mini-stage deux fois. Nous encourageons ce type d’action car cela permet à un jeune de s’immerger dans un secteur professionnel nouveau et de voir s’il a envie de se réorienter.
Dans le cadre de la mission orientation, nous organisons des ateliers d’aide à la création de CV et de préparation à l’entretien de recrutement. Nous organisons aussi des séances de témoignages d’employeurs, de maîtres d’apprentissage, des visites de CFA, des entretiens individuels, du job dating. Nous souhaitons que la personne ne soit pas en orientation subie mais choisie.
Quels sont vos rapports avec la Région Île-de-France ?
Nos rapports avec la Région Île-de-France sont plutôt bons car ils encouragent l’apprentissage.
Nous avons mis en place les “points A” : cela consiste à faire venir, dans tous les départements, une personne qui répond aux questions que les entreprises se poseraient sur l’apprentissage ou l’alternance.
Nous avons aussi mis en place la bourse de l’alternance dispositif en ligne où tous les jeunes de nos écoles peuvent mettre leurs CV Curriculum vitae . Les entreprises qui ont des besoins y inscrivent également leurs offres. Ainsi, au sein de la CCI, nous avons des personnes qui regardent dans la CV-thèque si un CV d’étudiant et une annonce sont compatibles. Cette bourse de l’alternance est accessible pour tous les niveaux. Elle est ouverte aux entreprises de l’ensemble de la région parisienne et à n’importe quel étudiant, même s’il ne vient pas de nos écoles. Cette bourse a été mise en place en 2017. Nous l’avons beaucoup proposée (aux maires des communes, aux jeunes). J’espère que ce dispositif sera maintenu.
Avez-vous enregistré une augmentation des entrées en apprentissage ?
De manière générale non, mais cela dépend des métiers. L’apprentissage est encore victime de préjugés dans les familles. Il y a encore des freins à lever, même si l’apprentissage dans le supérieur améliore son image. Nous organisons des nuits de l’orientation, des portes ouvertes aux jeunes, mais aussi aux parents, qui permettent de découvrir les métiers et le monde de l’entreprise.
L’apprentissage est une forme d’ascenseur social »Il faut aussi convaincre les entreprises que les apprentis peuvent constituer un vivier de candidats dans une démarche de pré-recrutement.
Pourtant l’apprentissage est une forme d’ascenseur social. Il permet, par exemple, à une personne de commencer à un niveau V dans une filière donnée, puis de continuer vers les diplômes plus élevés si cela lui convient et si elle est compétente. Nous avons des filières d’éco-activité, des filières de management, et des filières dans la gastronomie, le luxe et le design. Ensuite l’offre se décline en fonction des établissements.
Quel est le taux de réussite aux examens dans vos CFA ?
Il est de plus de 90 % toute formation confondue. Pour certains niveaux, il est de 100 %, dans d’autres, de 77 %. Nos CFA permettent de préparer plusieurs types de diplômes :
• Les diplômes qui relèvent de l’État (nous en préparons) ;
• Les diplômes qui relèvent d’une branche professionnelle ;
• Les titres consulaires très cotés auprès des entreprises parce qu’ils répondent à des besoins donnés.
Lorsque des entreprises expriment des besoins de formations qui n’existent pas, nous ouvrons une formation et nous en fermons d’autres si le besoin n’existe plus.
Et quel est le taux d’insertion de vos apprentis ?
Sept mois après la fin de la formation, nous sommes à près de 90 % de taux d’insertion. Nous n’avons pas la lourdeur administrative de l’Éducation nationale. Cette dernière met des années à bâtir un référentiel et à le mettre à jour. De notre côté, nous nous adaptons aux besoins des entreprises grâce aux conseils de professionnels, aux conseils d’établissements dans les écoles qui nous renseignent sur l’évolution des techniques et des métiers. Ensuite, nous recomposons le titre et nous le redéposons au RNCP Répertoire national des certifications professionnelles . La réactivité et la capacité d’adaptation constituent un des atouts de nos formations.
Quels sont les besoins des entreprises sur votre territoire ?
Nous constatons beaucoup de besoins dans le domaine du bâtiment et dans les NTIC, en robotique ou en numérique notamment »Nous constatons beaucoup de besoins dans le domaine du bâtiment et dans les NTIC Nouvelles technologies de l’information et de la communication , en robotique ou en numérique notamment. Nous proposons suffisamment de formations pour pouvoir répondre aux besoins des entreprises. Toutefois il y a une pénurie de niveaux intermédiaires pour les grands chantiers : des conducteurs de travaux de niveau bac +2, par exemple. D’ailleurs, les offres d’emploi ne sont pas forcément liées à un diplôme proprement dit, mais plutôt à des compétences transverses, aux softs skills.
Et qu’en est-il des ruptures de contrats d’apprentissage dans les CFA de la CCIR ?
Le taux de rupture dépend des niveaux et des filières. Au total, il représente moins de 9 %. Dans certaines filières, c’est moins de 6 %, alors que la moyenne nationale se situe plutôt entre 21 et 25 %. Ce taux est peu élevé grâce aux efforts que nous faisons en termes d’accompagnement. Nous faisons en sorte que le jeune soit bien orienté et bien renseigné. Nous avons également des conseillers relations école-entreprises qui font le lien entre l’école et l’entreprise quelle que soit la difficulté (professionnelle, personnelle…). Cela contribue à la limitation du nombre de ruptures. Nous avons aussi des personnes en charge de la médiation, mais nous utilisons très peu cette fonction.
Quelles opportunités voyez-vous pour votre département ?
En termes d’emplois, de développement de l’apprentissage, je crois beaucoup aux Jeux Olympiques (JO) et au Grand Paris express. La cartographie des métiers du COJO Comité d’organisation des Jeux olympiques et de Solideo Société de livraison des ouvrages olympiques nous intéresse car si nous pouvons permettre à nos étudiants d’aller vers des métiers qui recrutent ce serait formidable. Nous savons faire de l’ingénierie, créer un outil de formation adapté à un besoin donné.
J’ai entendu parler de la création d’une école pour les JO Jeux olympiques , pour former des personnes à tel moment pour tel type d’appel d’offres : nous serions capables de nous insérer dans cette école. Il existe aussi les opportunités pour former les bénévoles, qui auront peut-être besoin d’une formation adaptée pour l’accueil du public. Nous pouvons mettre à disposition nos étudiants, quitte à dédoubler des formations pour répondre aux besoins des entreprises, mais il faut que le COJO nous donne les informations au bon moment car une entreprise ne va pas se dire qu’elle aura peut-être un marché un jour : c’est compliqué d’anticiper, une entreprise ne recrute que si elle a un marché, elle ne peut pas recruter pas avant. Nous travaillons également beaucoup sur la GPEC Gestion prévisionnelle de l’emploi et des compétences des entreprises pour que le savoir soit transmis. La valorisation des formations de tuteurs et de maître d’apprentissage permet de mieux former et de mieux transmettre le savoir.
Danielle Dubrac
Présidente @ UNIS
Présidente @ CCI Seine-Saint-Denis
Conseiller « Groupe des entreprises » au nom de CCI France @ Conseil économique, social et environnemental (Cese)
Présidente de la délégation de Seine-Saint-Denis @ Association « Les Femmes Chefs d’Entreprises de France »
Chef d’entreprise @ Cabinet Sabimmo
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Parcours
Présidente
Présidente
Conseiller « Groupe des entreprises » au nom de CCI France
Présidente de la délégation de Seine-Saint-Denis
Chef d’entreprise
Secrétaire générale
Fiche n° 35116, créée le 29/04/2019 à 14:42 - MàJ le 26/06/2020 à 10:57
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