« Une approche expérimentale dans la prévention de l’absentéisme » (Claire Silva, AG2R La Mondiale)

Claire Silva, membre du comité de direction groupe en charge des ressources humaines et des relations sociales chez AG2R La Mondiale, répond à News Tank

Vous avez signé deux accords QVCT fin mai 2024. Aviez-vous déjà conclu des accords sur ces problématiques ?

La signature de ces accords est une première pour le groupe. Néanmoins, nous menons depuis longtemps de nombreuses actions liées à la QVCT, que nous avons souhaité formaliser avec les partenaires sociaux. Notre volonté conjointe est de développer une véritable culture de la prévention, avec l’objectif de préserver le mieux possible la santé physique et psychique de nos collaborateurs, et ce, dans un contexte de transformation de l’entreprise.

Les textes concernent nos deux structures employeur de façon simultanée. Pour l’UES AG2R, nous avons signé un accord QVCT à la majorité des OS représentatives (CFDT, CGT, Solidaires et Unsa Union nationale des syndicats autonomes ) et pour l’UES la Mondiale, l’accord est unanime avec la CFDT et la CFE-CGC. Le contenu de ces deux textes est identique.

Quels sont les objectifs de ces accords ?

Nous actionnons l’ensemble des leviers de la QVCT en impliquant tous les acteurs de l’entreprise : la DRH, les directions métier, le management à tous les niveaux, les collaborateurs et les représentants du personnel. Pour nous, il s’agit de :

• renforcer la prévention primaire Intervention en amont de manière à diminuer le risque d’exposition ou l’exposition du salarié à des risques identifiés de tous les risques, y compris les postures de travail, les risques psychosociaux (RPS) et les risques professionnels d’une façon générale, entité par entité ;
• garantir l’équilibre vie privée et vie professionnelle ;
• prévenir l’absentéisme et lutter contre la désinsertion professionnelle ;
• continuer à renforcer l’égalité professionnelle et l’inclusion des personnes LGBTQIA+ Lesbienne, Gay, Bisexuel·le, Trans*, Queer et Intersexe et Asexuel·le ou Aromantique .

Quelles en sont les principales mesures ?

Nous allons d’abord former nos managers, puis nos collaborateurs à la prévention primaire des RPS. Nous sommes en train de développer des modules de formation pour tous, qui seront obligatoires pour les managers.

Nous allons aussi déployer des secouristes en santé mentale au sein de l’entreprise. Ces derniers seront des collaborateurs volontaires, formés pour intervenir auprès de salariés qui pourraient être en situation de difficulté psychique aiguë (troubles dépressifs, anxieux ou liés à la consommation de substances). Le contenu des formations en RPS et en premiers secours en santé mentale (PSSM Premiers Secours en Santé Mentale ) sera partagé avec les représentants des CSSCT.

Comprendre les arrêts de travail de courte durée répétés sur une période donnée »

La prévention de l’absentéisme est aussi un axe fort de l’accord. Nous nous engageons dans une approche expérimentale avec deux axes.

• Un axe individuel pour comprendre les arrêts de travail de courte durée répétés sur une période donnée. En effet, il nous semble important de déterminer si ces absences peuvent trouver leur origine dans l’entreprise (exemples : ambiance au travail, organisation, surcharge de travail, etc.).

Nous souhaitons mener une réflexion dans le cadre de groupes de travail entre la direction et les représentants des OS, afin de déterminer les modalités du champ d’une expérimentation dans ce cadre (échantillon, type d’arrêt de travail, envoi d’un questionnaire confidentiel et anonyme aux collaborateurs, etc.).

• Un axe collectif qui concerne les absences multiples dans un même service ou périmètre. Nous souhaitons ainsi proposer aux OS des seuils à partir desquels nous déciderons d’examiner la situation avec le management, afin d’objectiver les raisons de ces absences. Nous devons, en effet, nous interroger sur des signaux faibles que les RH ou le niveau managérial n’auraient pas été en mesure de capter.

Le fait même de nous intéresser au sujet est un signal adressé à nos collaborateurs que nous sommes à leur écoute, et qu’il est possible de définir, si besoin, des plans d’action. Nous sommes dans le renforcement de la culture de la prévention et dans la volonté d’un dialogue sans tabou, y compris sur ce sujet important de l’absentéisme.

La santé mentale des collaborateurs est-elle un sujet préoccupant ?

Le sujet n’est pas plus préoccupant au sein de notre entreprise qu’ailleurs. Nous estimons que c’est un sujet important. Personne n’est à l’abri d’un burn-out et ce type de problématiques au sein d’une équipe arrive parfois à cause d’un manque de communication et d’écoute. Cette question de la santé mentale peut aussi être liée à l’intensification des technologies. Nous souhaitons développer la culture de l’écoute. À travers cet accord, nous voulons aussi nous interroger sur la gestion du temps pour en aborder les quatre dimensions au plus près du terrain :

Il est important de retrouver du temps pour penser »

• le temps passé en réunion ;
• celui passé à manager son équipe ;
• à produire ;
• et à réfléchir sur ses actions.

Il est important de retrouver du temps pour penser.

Quelles sont les autres dispositions des accords ?

Nous rappelons l’ensemble de nos dispositifs, car la frontière devient de plus en plus poreuse entre la vie personnelle et professionnelle :

• la déconnexion, par exemple dans le cadre de la pratique du télétravail, qui implique que chacun se discipline pour respecter des temps de connexion adaptés ;
• les temps de repos et de durée maximale de travail ;
• les bons principes d’organisation de réunion ;
• le respect de la parentalité des collaborateurs ;
• les bonnes pratiques en matière de télétravail. Le nombre de jours de télétravail pour les proches aidants passe de six à dix jours par an ;
• l’égalité professionnelle, la diversité et l’inclusion de tous nos collaborateurs, quelle que soit leur situation et leur genre à travers le renouvellement de la signature de la charte de L’Autre Cercle  ;
• les dispositifs de recours en cas de violence conjugale ou intrafamiliale.

Nous insistons en outre sur la vision partagée de la stratégie d’entreprise à travers nos lignes managériales. Il faut prendre le temps d’expliquer les objectifs clés. Les collaborateurs ont besoin de comprendre dans quel cadre ils inscrivent leurs actions tout au long de l’année. Ce qui contribue au sentiment d’appartenance autant qu’à la fierté individuelle et collective.