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De la compatibilité du droit de l’apprentissage et du droit de l’éducation (Jean-Pierre Willems)

News Tank RH - Paris - Analyse n°384502 - Publié le
©  Seb Lascoux
©  Seb Lascoux

Le développement massif de l’apprentissage dans l’enseignement, et notamment dans l’enseignement supérieur, pose des questions d’articulation entre le droit de l’apprentissage, qui relève du Code du travail et concerne, par principe, un jeune salarié, et le droit de l’éducation qui se réfère exclusivement au statut d’étudiant. Le projet de décret présenté le 14/01/2025 au Cneser illustre cette difficulté de prise en compte des spécificités de l’apprentissage, qui n’est pas sans poser questions dans le débat sur la qualité de l’apprentissage.

Une analyse de Jean-Pierre Willems Chargé d’enseignement politiques droit et pratiques de formation - master DRH @ Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne • Consultant @ Willems Consultant
pour News Tank.


Les spécificités de l’apprentissage

La formation par apprentissage, telle qu’organisée par la loi du 05/09/2018, présente cinq caractéristiques cumulatives que l’on ne retrouve dans aucun autre dispositif de formation à titre obligatoire :

  • L’apprenti est un salarié inscrit par l’entreprise au CFA : c’est l’entreprise qui passe convention avec le CFA pour la formation par apprentissage et non l’apprenti. Le statut de salarié est applicable au jeune en formation, le temps de formation étant assimilé à du temps de travail ;
  • L’objet de l’apprentissage est l’acquisition d’un diplôme ou d’un titre : les années non diplômantes ne peuvent donc faire l’objet d’un contrat d’apprentissage quand bien même elles permettraient de valider une partie du titre ou diplôme ;
  • La pédagogie de l’alternance impose au CFA de mettre en place un parcours qui articule les compétences acquises au CFA et celles qui seront acquises en entreprise. Un processus formalisé itératif associant les enseignements du CFA et les activités formatives en entreprise doit être élaboré (Qualiopi indicateur 13) ;
  • L’apprenti doit bénéficier d’un accompagnement professionnel qui se décline en appui à la recherche d’entreprise, aide à la reprise d’un contrat en cas de rupture du contrat initial et aide à l’orientation professionnelle en fin de contrat ;
  • L’apprenti doit bénéficier d’un accompagnement social afin de prévenir les événements ou situations qui pourraient conduire à l’interruption du parcours.

Si ces cinq dimensions ne sont pas mises en œuvre, nous ne sommes pas en présence d’un parcours de formation par apprentissage.

Ces spécificités sont pourtant mal prises en compte par le droit de l’éducation.

Des spécificités mal prises en compte

Les principales difficultés d’articulation entre le droit de l’éducation et le droit de l’apprentissage sont les suivantes :

  • L’articulation entre le processus d’admission, le recrutement par l’entreprise et l’appui que doit apporter le CFA ;
    Selon l’article L. 6231-2 2°)  du Code du travail, le CFA doit « appuyer et accompagner les postulants à l’apprentissage dans leur recherche d’un employeur ».
    Il en résulte que si le CFA peut mettre en place un processus de sélection pour l’entrée en apprentissage, il ne peut reporter sur le candidat l’obligation qui lui est faite d’accompagner la recherche d’entreprise. Un CFA qui n’admettrait que les apprentis disposant d’un contrat contreviendrait à ses obligations.
  • La mise en place d’un parcours spécifique et adapté qui met en œuvre une véritable pédagogie de l’alternance ;
    Cette condition ne présente pas, ou ne devrait pas présenter, de difficultés lorsque le parcours de formation n’accueille que des apprentis. Il est plus problématique lorsque le cursus est dispensé à la fois à des étudiants et à des apprentis. Dans ce cas, le CFA doit justifier d’un aménagement du cursus pour les apprentis qui tienne compte des activités réalisées en entreprise et du temps disponible pour la formation en CFA. Si aucune adaptation n’est réalisée ou si elle est insuffisante, le CFA ne remplit pas sa mission.
  • Les processus de validation du diplôme (validation partielle, redoublement, sessions de rattrapage d’examen…) et les règles relatives au contrat de travail et notamment sa durée.
    Le sujet est d’autant plus important que 35 % des étudiants valident leur licence en trois ans et que 50 % des étudiants mettent plus de deux ans pour obtenir leur master. Or, si le contrat d’apprentissage a été assoupli avec une durée modulable, il n’en reste pas moins que cette durée dépend de l’entreprise, qu’elle suppose un temps de formation proportionnel en cas de prorogation du contrat et que c’est in fine l’entreprise qui décide de conserver ou pas l’apprenti et de prolonger, ou pas, son contrat en cas d’échec au diplôme.

Le projet de décret sur la plateforme mon Master

Un projet de décret a été présenté le 14/01/2025 au Cneser visant à modifier la procédure d’inscription en Master.

Le calendrier 2025 serait ainsi fixé :

Calendrier général de la procédure de recrutement

Ces informations sont tirées du projet d’arrêté 2025 relatif au calendrier de la procédure dématérialisée de candidature et de recrutement en première année des formations conduisant au diplôme national de master au titre de l’année universitaire 2025-2026.

La procédure dématérialisée de candidature pour les formations de master est organisée en trois phases :

  • Publication de l’offre : 03/02/2025

  • Phase principale : du 25/02 au 16/06/2025.
  • Phase complémentaire : du 17/06 au 17/07/2025.
  • Phase de gestion des désistements : du 18/07 au 31/08/2025.
Phase principale

Pour les formations hors alternance :

  • Dépôt des candidatures : 25/02 au 24/03/2025.
  • Examen des candidatures : 31/03 au 27/05/2025.
  • Admission : 02/06 au 16/06/2025.

Pour les formations en alternance :

  • Dépôt des candidatures : 25/02 au 24/03/2025.
  • Examen des candidatures : 31/03 au 29/04/2025.
  • Admission : 02/05 au 16/06/2025.
Délais d’acceptation des propositions d’admission en master

Pour les formations hors alternance :

Le candidat indique s’il accepte ou refuse les propositions faites par les établissements et, dans le cas d’une acceptation provisoire, s’il conserve ses placements sur liste d’attente, au plus tard :

  • le 05/06/2025, pour une proposition reçue entre le 2 et le 04/06/2025 inclus ;
  • le lendemain du jour au cours duquel une proposition lui est faite, lorsque cette dernière intervient entre le 5 et le 15/06/2025 inclus.

Pour les formations en alternance :

Les propositions d’admission sont notifiées aux candidats placés en recherche de contrat entre le 13/06/2025 et le 15/06/2025 inclus.

Le candidat indique s’il accepte ou refuse les propositions d’admission faites par les établissements et, dans le cas d’une acceptation provisoire, s’il conserve ses placements en recherche de contrat ainsi que ses places sur liste d’attente dans des formations en alternance, au plus tard le 16/06/2025.

Phase complémentaire

La phase complémentaire comprend :

  • Dépôt et classement des candidatures : 17/06 au 23/06/2025.
  • Examen des candidatures : 24/06 au 04/07/2025.
  • Admission : 08/07 au 17/07/2025.
Phase de gestion des désistements

Lors de la phase de gestion des désistements, les candidats indiquent s’ils acceptent ou refusent les propositions d’admission qui leur sont transmises, au plus tard :

  • Avant le 18/08/2025 pour les propositions reçues entre le 18/07 et le 17/08/2025.
  • Le lendemain pour les propositions reçues entre le 18/08 et le 30/08/2025.
Téléversement et validation des contrats pour l’alternance
  • Téléversement des contrats ou certificats d’engagement : 02/05 au 28/08/2025.
  • Validation par les établissements :
    • Sous huit jours pour les documents téléversés avant le 17/07/2025.
    • Avant le 29/08/2025 pour les documents téléversés après le 17/07/2025.
  • Après le 28/08/2025, les candidats autorisés à débuter une formation en alternance sans disposer de contrat communiquent leur contrat d’alternance directement à l’établissement jusqu’à l’expiration d’un délai de trois mois suivant le commencement de la formation.
Inscriptions administratives dans les formations proposées sur la plateforme

Date limite pour débuter l’inscription administrative :

  • 24/07/2025 pour les candidats ayant accepté définitivement une proposition d’admission jusqu’au 17/07/2025 inclus.
  • Selon les délais fixés par le chef d’établissement pour les admissions acceptées à partir du 18/07/2025.
Signalement des places vacantes

À l’issue de la période des inscriptions administratives, les établissements peuvent signaler sur la plateforme les places restées vacantes à partir du 25/07/2025.

Dans ce calendrier, les candidats en alternance disposeraient d’un délai d’un mois et demi pour trouver un contrat après leur positionnement en « Recherche de contrat ». La conclusion d’un contrat, ou l’engagement de l’employeur, conditionnerait l’admission.

La question posée par ce calendrier très court est dans la nature de l’aide apportée par le CFA à la recherche d’emploi pendant ce laps de temps d’un mois et demi. Et la garantie que cette aide bénéficie à tous les candidats (postulants à l’apprentissage selon l’article L. 6231-2) de la même manière. À défaut, le CFA ne remplirait pas sa mission d’accompagnement.

La question plus large d’un apprentissage de qualité

Le débat sur la qualité de l’apprentissage prend souvent la forme simpliste du traditionnel « vices privés, vertus publiques », principe selon lequel seul le secteur privé pourrait être défaillant et méconnaître ses obligations. Un minimum de bonne foi doit conduire à poser, pour un apprentissage de qualité, trois questions :

  • Qu’est-ce qu’un apprentissage de qualité ou comment se déclinent qualitativement les spécificités de l’apprentissage. Qualiopi est un repère très insuffisant sur ce point ;
  • Comment articuler le droit de l’éducation et le droit de l’apprentissage et garantir que les spécificités de l’apprentissage sont bien prises en compte par le système éducatif, notamment dans l’enseignement supérieur ;
  • Comment tirer toutes les conséquences du fait que l’apprentissage, depuis le 01/01/2019, n’est plus une activité de service public placée sous le contrôle des conseils régionaux, mais une activité de marché libre d’accès et réglementée de manière spécifique dans son exercice.

Tant que ces trois questions ne seront pas traitées frontalement, nous serons confrontés au risque de l’incohérence et au flot des préjugés.

Jean-Pierre Willems

Parcours

Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne
Chargé d’enseignement politiques droit et pratiques de formation - master DRH
Willems Consultant
Consultant
IGS Toulouse
Responsable du master RH
Centre de recherche et d’information sur le droit de la formation (UT1)
Partenaire

Établissement & diplôme

Université Toulouse 1 Capitole
DESS Gestion du personnel - Droit (Michel Despax)

Fiche n° 24709, créée le 10/08/2017 à 15:40 - MàJ le 04/02/2025 à 18:44


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©  Seb Lascoux
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