Prime apprentissage, NPEC, CEJ : « Mieux cibler les financements » (Cour des comptes)

News Tank RH - Paris - Actualité n°383444 - Publié le
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« Après avoir été fixés à des niveaux très élevés et sous-tendus par des dépenses en forte hausse, les objectifs tenant au nombre de jeunes à accompagner et au nombre d’apprentis doivent être revus à la faveur d’un meilleur ciblage », indique la Cour des comptes dans le rapport « Les mesures d’aide exceptionnelles : une sortie de crise à achever pour le budget de l’État » publié le 09/01/2025.

« Dans le cas de l’apprentissage, il est devenu indispensable d’engager le repli du soutien de l’État en recentrant les aides sur les formations des niveaux 3 et 4, en diminuant le montant de l’aide à l’embauche et les niveaux de prise en charge des formations et en réduisant les avantages fiscaux qui mitent le financement des CFA. »

« Les mesures décidées pour favoriser la reprise d’activité au-delà de la crise sanitaire ont particulièrement ciblé les jeunes, à travers l’amplification du plan “1 jeune, 1 solution” et un soutien accru à l’apprentissage après la réforme de ce dernier en 2018. Dans les deux cas, le maintien d’objectifs quantitatifs très élevés s’est traduit par une extension du champ des bénéficiaires et une dégradation de leur ciblage, au bénéfice de publics qui en ont moins besoin, voire pour lesquels le soutien public s’apparente à un effet d’aubaine. »


Aide à l’embauche des apprentis : « Cibler les publics qui en ont le plus besoin »

  • « Le niveau élevé de l’aide à l’embauche et du niveau de la prise en charge des formations, qui servent cet objectif d’un million d’apprentis, s’est déjà traduit par un déport des contrats de professionnalisation vers les contrats d’apprentissage et par une augmentation massive de ces derniers (826 853 nouvelles entrées en 2023 dans le secteur privé, soit +270 % par rapport à 2018).
  • Cependant, cette augmentation a concerné majoritairement l’enseignement supérieur, dont les étudiants représentent plus de la moitié des flux annuels depuis 2020 : de 33,9 % des nouveaux contrats en 2015 à 56,1 % en 2020, 61,2 % en 2022 et 61,4 % en 2023.
  • Cette évolution conduit à mobiliser l’aide de l’État pour des publics qui rencontrent pourtant moins de difficultés d’accès à l’emploi. Le retour des étudiants vers le contrat de professionnalisation serait plus efficient : ce dispositif est moins onéreux pour les finances publiques et présente des taux d’insertion professionnelle légèrement plus élevés (+ 1 point) que pour les contrats d’apprentissage bénéficiant aux étudiants.
  • À l’inverse, le nombre d’apprentis préparant des diplômes du secondaire, c’est-à-dire aux niveaux de qualification 3 et 4, pour lesquels l’apprentissage favorise le mieux l’insertion, a nettement baissé de 2000 à 2017 et a peu augmenté depuis. Il convient donc de cibler les aides à l’apprentissage sur les jeunes pour lesquels il s’avère décisif en termes d’insertion. »

• Recommandation : cibler l’aide à l’embauche des apprentis jusqu’au niveau bac et exclure les entreprises de plus de 250 salariés (retour au périmètre de la réforme de 2018).

• Économie attendue : 745 M€ en 2025, 2 936 M€ en 2026 et 2 857 M€ à horizon 2027.

• Le PLF 2025 déposé en octobre 2024 prévoit une diminution de 651 M€ en AE et 55 M€ en CP par rapport à la LFI 2024 du fait d’une diminution du montant unitaire de l’aide à l’embauche en contrat d’apprentissage.

Financement des CFA : « Plafonner les niveaux de prise en charge des contrats pour les diplômes de niveau 6 et 7 et prévoir un reste à charge pour les employeurs »

  • « Dans des rapport antérieurs, la Cour relevait un déport des étudiants en contrat de professionnalisation vers les contrats d’apprentissage. Or, malgré des résultats presque identiques en termes d’insertion, les contrats d’apprentissage sont plus onéreux pour l’État que les contrats de professionnalisation.
  • Pour le financement des contrats de niveau 6 et plus, la Cour recommandait donc d’envisager un plafonnement des niveaux de prise en charge et la possibilité de faire contribuer davantage les employeurs d’apprentis de l’enseignement supérieur au financement de leur formation.
  • Selon un scénario quantifié par la Cour, un niveau de plafonnement cohérent avec les coûts moyens constatés en 2022, soit 7 695 € pour le niveau 6 et 8 486 € pour le niveau 7, pourrait être envisagé. Les coûts au-delà de ces plafonds seraient pris en charge par les employeurs en cohérence avec l’objectif de recentrer le soutien public sur les formations des niveaux 3 et 4. Ce scénario représenterait une économie estimée à 255 M€ par an dès 2025. »

• Recommandation : plafonner les niveaux de prise en charge des diplômes de l’enseignement supérieur au coût moyen constaté pour les licences et les masters.

• Économie attendue : 255 M€ en CP en 2025 et à horizon 2027.

Entreprises : « Supprimer certaines des exonérations de contribution à l’apprentissage »

  • « Certaines catégories d’entreprises restent exonérées du paiement de la taxe d’apprentissage (0,68 % de la masse salariale) intégrée à la Cufpa, soit en raison des caractéristiques de l’entreprise (les petites entreprises occupant un ou plusieurs apprentis et dont la masse salariale est inférieure à six fois le Smic annuel), soit en raison de leur nature (personnes morales intégralement exonérées de l’impôt sur les sociétés, personnes imposées au titre des bénéfices non commerciaux). Par ailleurs, un taux réduit est appliqué dans les départements du Haut-Rhin, du Bas-Rhin et de la Moselle.
  • Ce dernier taux représente une moindre recette de 53 M€ alors que la part de l’apprentissage dans l’emploi salarié dans ces trois départements est équivalente à celle observée au niveau national. L’exemption liée au statut juridique (associations, mutuelles, etc.) représente quant à elle 239 M€ et celle dont bénéficie le secteur agricole 15 M€ (pour 4,9 % des apprentis).
  • Les gains en recettes générés par la suppression de ces exemptions ou taux minorés et leur alignement sur le droit commun sont estimés à 373 M€ en 2025, selon le chiffrage effectué par une mission IGF-Igas en 2023. »

• Proposition : supprimer les exonérations spécifiques d’assiette de taxe d’apprentissage et mettre fin au taux réduit dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle.

• Économie attendue : 373 M€ en 2025 et à horizon 2027.

Contrat d’engagement jeunes : « Revoir les objectifs quantitatifs et cibler davantage l’accompagnement »

  • « Le remplacement de la Garantie jeunes par le CEJ en 2022 s’est accompagnée du maintien d’un objectif d’accompagnement supérieur à celui du plan “1 jeune, 1 solution”, avec une cible annuelle de 300 000 jeunes (200 000 jeunes accompagnés par les missions locales et 100 000 jeunes par France Travail) au lieu de 100 000 jeunes avant la crise sanitaire. En 2022 et 2023, cet objectif a été atteint, avec plus de 590 000 bénéficiaires, dont 64 % en missions locales et 36 % par France Travail.
  • Comme l’a déjà recommandé la Cour, la pérennisation d’un niveau d’objectif défini durant la crise et maintenu au-delà doit être remise en question, en vue d’un ciblage plus efficient en faveur des jeunes les plus éloignés de l’emploi. Si un premier pas a été fait dans ce sens en 2024 avec une cible revue de 300 000 à 285 000 jeunes, il apparaît possible d’amplifier cette réduction de voilure dès 2025.
  • L’objectif d’accompagnement pourrait être révisé selon deux scénarios (150 000 ou 200 000 jeunes), en faisant porter davantage l’effort de réduction sur France Travail, qui accompagne des jeunes en moyenne plus proches de l’emploi que les Missions locales Service public de proximité pour aider les jeunes de 16 à 25 ans à surmonter les difficultés faisant obstacle à leur insertion professionnelle et sociale . Les économies ont été chiffrées par la Cour à l’aide de l’outil de modélisation de la DGEFP, par référence à la trajectoire de dépense qui résulterait du maintien de l’objectif actuel de 285 000 jeunes (927,4 M€ en 2025, 943,4 M€ en 2026 et 959,9 M€ en 2027). »

• Proposition : réduire l’objectif quantitatif annuel du CEJ, en particulier dans le cadre des objectifs confiés à France Travail.

• Économie attendue : 255 M€ en 2025, 446 M€ en 2026 et 454 M€ à horizon 2027.

Cour des comptes

Juridiction financière de l’ordre administratif
• Création : 1807
• Mission : vérifier l’emploi des fonds publics et sanctionner les manquements à leur bon usage
• Organisation et fonctionnement : La Cour des comptes est composée de magistrats financiers répartis en 7 chambres, La Cour et les chambres régionales et territoriales des comptes forment les juridictions financières indépendantes des pouvoirs publics
• Premier président  : Pierre Moscovici
• Contact : Julie Poissier, directrice de la communication
• Tél.  : 01 42 98 55 77


Catégorie : Etat


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Fiche n° 7373, créée le 06/07/2018 à 14:48 - MàJ le 29/01/2025 à 12:43