Apprentissage : une charte élaborée par la Dgesip avec les établissements pour « maintenir la qualité »
« L’apprentissage dans le supérieur a augmenté de 78 % en deux ans. On ne peut que se réjouir de ce succès, et c’est pour cela qu’il faut que cet accroissement ne rime pas avec une baisse de la qualité. Avec la DGEFP, nous travaillons main dans la main sur ce sujet, dans la droite ligne de ce que nous faisons sur le label Qualiopi. La régulation de l’apprentissage ne passe pas uniquement par une régulation des coûts, mais aussi par une assurance de la qualité. »
C’est ce que déclare Anne-Sophie Barthez, Dgesip, en ouverture d’une matinée de lancement de la charte « pour un accompagnement responsable et de qualité des apprentis des établissements d’enseignement supérieur », le 24/10/2023, au MESR.
La charte décrit notamment les engagements de chaque partie prenante de l’apprentissage : établissements, employeurs, CFA, apprentis, et comporte un « support opérationnel » afin de guider les établissements dans leur démarche d’un accompagnement de qualité des apprentis.
« Elle est le fruit d’une concertation de plusieurs mois, éclairée par une quinzaine d’experts, et un dialogue avec les représentants des établissements et les acteurs du monde socio-économique », ajoute la Dgesip.
Présentes lors de cet événement, les conférences d’établissements se félicitent de sa mise en place. « En réunissant tous les acteurs de l’apprentissage, elle montre que nous faisons de la qualité, dans une démarche d’amélioration continue. Nous sommes à un moment stratégique de communication collective pour dire que l’enseignement public peut proposer des formations à la pointe des besoins des entreprises, car on a le savoir-faire mais il s’agit désormais de le faire savoir », déclare Laurent Gatineau, président de CY Cergy Paris Université, et VP du conseil formation de France Universités.
Répondre à l’enjeu qualitatif posé par la hausse du nombre d’apprentis
Anne-Sophie Barthez revient sur la hausse importante du nombre d’apprentis dans le supérieur ces dernières années, qu’elle explique par trois facteurs :
- « la loi de septembre 2018, qui a été un moment clé en matière de dérégulation dans le bon sens du terme ;
- les aides à l’embauche, qui se poursuivent;
- et ce qui est sans doute la meilleure raison, c’est l’engouement des étudiants pour ce type de formation. »
« Aujourd’hui, les très bons étudiants, au niveau master en tout cas, vont dans les formations en apprentissage. Dans le premier cycle également, c’est un élément d’attractivité puisque ces étudiants savent qu’ils vont avoir une insertion professionnelle de qualité, qu’ils vont bénéficier d’une pédagogie adaptée, et qu’ils ne paieront pas de frais d’inscription », indique-t-elle.
Une démarche d’amélioration continue
Un engouement qui pose le sujet de la qualité, surtout dans la perspective du million d’apprentis d’ici 2027 souhaité par Emmanuel Macron. « C’est un enjeu ambitieux de développement quantitatif et qualitatif. Dans cette dynamique, des choses existent déjà, on a mis en place un ensemble de repères, d’outils, le référentiel Qualiopi. Mais Qualiopi, c’est d’abord à l’ensemble des prestataires de développement des compétences que ça s’adresse, pas simplement aux CFA », indique Stéphane Rémy, sous-directeur des politiques de formation et du contrôle DGEFP.
« Même s’il y a quelques indicateurs, quelques spécificités, dans le référentiel qualité pour l’apprentissage, il est important qu’on puisse avoir d’autres signes, d’autres exigences, d’autres engagements. C’est le sens de la charte. Elle n’est pas contraignante, c’est une volonté d’amélioration continue », dit-il.
Christine Bruniaux, cheffe du département formation et emploi, insertion professionnelle à la Dgesip complète : « Cette charte ne va pas nécessiter d’inspection ou d’audit. La charte ne se substitue pas aux dispositions réglementaires qui s’appliquent aujourd’hui. »
Mieux articuler formation et certification
Anne-Sophie Barthez rappelle l’enjeu de répondre au « bouleversement pédagogique » qu’implique l’apprentissage dans le supérieur. « Dispenser une formation en apprentissage, ce n’est pas simplement faire son cours magistral comme d’habitude, c’est se placer à l’écoute de ses étudiants, si particuliers et si engagés. Il faut y être attentif. »
« Quand on commence à rentrer dans cette problématique de la pédagogie, il y a plusieurs choses qui se jouent », ajoute Stéphane Rémy :
- « le processus de formation, et il faut s’assurer de ce qui est mis en place, que les 14 missions des CFA soient parfaitement assurées et assumées ;
- la certification, l’ingénierie de certification.
Et ce sont deux mondes qui sont parfois développés en parallèle, sans forcément bien s’articuler. On a là un enjeu important, qui mobilise aussi France Compétences. Il y a cet enjeu de régulation, de responsabilisation à l’égard des certificateurs, qu’ils soient publics ou privés. Cette charte s’inscrit dans ce paysage. »
Un levier pour les établissements du supérieur
« Un outil pour rassurer les acteurs économiques et pour communiquer » (Laurent Gatineau, France Universités)
« France Universités reçoit très favorablement cette charte, d’autant que récemment nous avons subi des attaques sur la qualité de nos formations. Nous avons su prendre le virage de la réforme de 2018 sur la formation professionnelle : on compte 40 CFA universitaires, et nous pouvons répondre aux enjeux de la GPEC de la Nation », déclare Laurent Gatineau.
« Ce qu’on demande aux universités, c’est “un jeune, une solution”, et cette charte vient justement individualiser cette démarche de formation. C’est le gage que demain personne ne pourra dire qu’un apprenti a été moins bien formé qu’un étudiant en formation initiale.
Avec cette charte qui comporte des items, des jalons, formalise les process, on se dote d’un outil pour rassurer les acteurs économiques quant à ce changement d’échelle, et pour que cela s’entende, jusqu’au Président de la République. »
« Affirmer l’apprentissage comme une voie d’excellence » (Delphine Manceau, CDEFM)
« Je suis ravie que cette charte ait été initiée par le MESR. Il se place ainsi en première ligne sur ce sujet de l’apprentissage qui vit les joies de l’interministériel, et qui fait que les établissements se sentent parfois balloté entre les interlocuteurs », indique Delphine Manceau, DG de Neoma BS, pour la CDEFM.
« Insertion professionnelle et qualité académique vont de pair, et les écoles de management en sont les exemples, tout comme les grandes écoles, les IAE et les universités. Il ne faut pas opposer les deux, au contraire : parce que nos étudiants sont bien formés au niveau académique, ils s’insèrent bien en entreprise et contribuent à être innovants. Cette charte affirme l’apprentissage comme une voie d’excellence, ce qui est important pour les étudiants, mais aussi pour les écoles pour continuer de s’améliorer. »
Pour Fabienne Villesèque Dubus, directrice de l’IAE de Perpignan et VP formations à IAE France, la charte s’inscrit dans la volonté de « maintenir dans l’apprentissage un socle de connaissances garant du niveau académique, et former des jeunes capables d’avoir cette vision réflexive sur le lien entre leur formation et les missions en entreprise ».
Accompagner les écoles dans la pédagogie de l’alternance
Pour Grégory Dechamp-Guillaume, chargé de mission apprentissage à la Cdefi, cette charte vient accompagner les établissements pour répondre à certaines complexités, notamment dans le cadre de la formation d’ingénieur qui dure trois ans. « Cela nécessite d’accompagner l’apprenti dans un contexte des changements de tuteurs, d’équipes, de missions, car sur ce temps de trois ans, les entreprises peuvent faire évoluer leur stratégie. Il faut donc accompagner les tuteurs, et les maîtres d’apprentissages. »
Il pointe aussi l’enjeu autour de la mobilité internationale, obligatoire dans la formation d’ingénieurs : « cela demande un accompagnement spécifique, ce qui nécessitera surement un complément à la charte ».
Du côté de la CGE, Claire Leroux, animatrice du groupe de travail apprentissage, estime que « beaucoup d’écoles du fait de leur accréditation CTI ou CEFDG ont déjà mis en œuvre des éléments décrits par la charte, et donc celle-ci va venir éprouver ce qu’elles ont mis en œuvre ».
« La pédagogie de l’alternance est large, elle s’appuie sur la démarche compétences, sur la valorisation de l’expérience, et dans les écoles ce n’est pas toujours simple à intégrer. La charte ne peut pas tout régler, mais cela va y contribuer », dit-elle.
Ce qu’en disent aussi des responsables de CFA, IUT et Opco
Une articulation avec l’approche par compétences
Pour Christophe Millet, directeur de l’IUT de Nantes et VP de l’Adiut sur les sujets de professionnalisation, entrepreneuriat et relation aux entreprises, la charte vient « accrocher l’approche par compétences mise en place dans le cadre de la réforme des BUT dans les IUT ».
« Cela nous a permis de passer de choses formalisées sur le contenu, les missions, à des mini bilans de compétences pour venir vérifier plus facilement l’adéquation entre les missions en entreprise et la formation, et les niveaux d’acquisition. Les visites en entreprise sont plus constructives », dit-il.
À l’université aussi, l’évolution des formations vers une construction en blocs de compétences fait évoluer les choses. Ce qui fait dire à Laurent Gatineau que la charte arrive à « un moment stratégique, car une bonne maquette est celle qui permet ce lien entre compétences académiques et professionnalisantes ».
Une enveloppe horaire contrainte
« Mais il y a une question cruciale, celle d’intégrer de plus en plus de compétences à acquérir dans une enveloppe contrainte, de 400 h de formation par an. Ce n’est pas toujours simple de convaincre les responsables de formations, d’autant qu’on est dans une période de changement d’échelle, et que le MESR oublie de créer des postes, donc cela met les équipes pédagogiques sous pression », ajoute le président de CY Cergy Paris Université.
Franck Giuliani, président du réseau FCU confirme : « Ce passage à l’échelle impacte nos organisations, pose des questions sur la manière dont nos collègues peuvent continuer à se mobiliser, y compris avec des contraintes fortes. Il faut que les présidents d’universités permettent d’étoffer les équipes dans les CFA, et que le MESR à travers les Comp puisse relayer cette démarche. »
Des propositions à venir du ministère de Carole Grandjean
Stéphane Rémy, sous-directeur des politiques de formation et du contrôle à la DGEFP, évoque aussi le travail mené, au-delà de la charte, sur « les questions de moyens, d’évolutions réglementaires. Il y aura sans doute un certain nombre de propositions faites, notamment sous l’égide de Guillaume Houzel, conseiller auprès de Carole Grandjean en charge des questions de qualité et de certification professionnelle. »
Ministère de l’éducation nationale (MEN)
• Ministère de l’Éducation Nationale et de la Jeunesse
• Création : 1932
• Objectifs : préparer et mettre en œuvre la politique du Gouvernement en faveur de l’accès de chacun aux savoirs et du développement de l’enseignement préélémentaire, élémentaire et secondaire.
• Ministre : Gabriel Attal
• Ministre déléguée chargée de l’Enseignement et de la Formation professionnels : Carole Grandjean
• Secrétaire d’État chargée de la Jeunesse et du SNU : Prisca Thevenot
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Fiche n° 8146, créée le 24/01/2019 à 10:03 - MàJ le 15/07/2024 à 14:53