Apprentissage : « Revenir à l’esprit de la réforme de 2018 pour réduire le coût du dispositif » (OFCE)
« Il apparaît qu’un ciblage plus efficace de l’aide exceptionnelle à l’embauche d’apprentis vers les populations les plus éloignées de l’emploi aurait permis d’économiser 5 Md€ en 2021 et près de 8 Md€ en 2022 », selon l’étude de Bruno Coquet
Conseil/expert (économie, emploi, protection sociale, politiques publiques) @ UNO Etudes & Conseil
chercheur associé OFCE
• L’Observatoire français des conjonctures économiques est un organisme indépendant de prévisions, de recherche et d’évaluation des politiques publiques hébergé par la Fondation nationale des…
, Sciences Po intitulée : « Apprentissage : un bilan des années folles », publiée par l’OFCE (Observatoire français des conjonctures économiques
• L’Observatoire français des conjonctures économiques est un organisme indépendant de prévisions, de recherche et d’évaluation des politiques publiques hébergé par la Fondation nationale des…
) le 14/06/2023.
« La politique d’apprentissage se déploie sans évaluation de son efficience. Son coût allant du simple au double dans les comptes publics. » Dans cette étude, Bruno Coquet reconstitue les dépenses publiques finançant l’apprentissage et son évaluation comptable aboutit à « un coût budgétaire de l’ordre de 16 Md€ en 2021 et 20 Md€ en 2022 ».
« Depuis 4 ans, mû par une dynamique exceptionnelle, l’apprentissage enchaîne les records, jusqu’à parvenir à 837 000 nouveaux contrats conclus et 970 000 apprentis en cours de formation en fin d’année 2022, deux fois plus que fin 2018. Plus d’un tiers des emplois salariés créés sur cette période sont des contrats d’apprentissage. »
Les deux leviers du succès de l’apprentissage
Ce succès s’appuie sur deux ressorts :
- d’une part, la réforme structurelle qui a remis à plat la politique d’apprentissage en 2018 ;
- d’autre part, l'aide exceptionnelle « très généreuse et non-ciblée » créée mi-2020 dans le cadre du Plan de relance, reconduite à plusieurs reprises sans lien avec les conséquences de la crise sanitaire.
Il y avait, fin 2022, 543 000 apprentis de plus qu’en 2018. « Nous estimons que la réforme de 2018 aurait contribué à hauteur de 20 % à cette hausse (+80 000) mais que l’aide exceptionnelle est à l’origine de l’essentiel des embauches d’apprentis (+460 000) », dit Bruno Coquet.
L’aide exceptionnelle a été reconfigurée en 2023 « dans le but d’atteindre le nouvel objectif du million d’entrées en apprentissage chaque année », mais « au prix d’une profonde mutation du dispositif, et pour un coût budgétaire qui reste très élevé ».
« Un retour à la réforme 2018 dans son esprit et sa lettre permettrait de réduire le coût budgétaire du dispositif, tout en gardant son efficacité pour l’insertion dans l’emploi des jeunes les plus exposés au risque de chômage. »
Une comptabilité « peu claire »
« L’année 2018 fait référence. D’une part, l’estimation de la dépense publique pour l’apprentissage fait à peu près consensus : 5,96 Md€, avec un stock annuel moyen de 414 000 apprentis. D’autre part, 2018 est la dernière année avant la réforme qui a été conçue à coût constant par redéploiement des aides existantes, ce qui facilite le chaînage.
L’autre référence est 2021, dernière année pour laquelle France compétences • Établissement public administratif créé par la loi du 05/09/2018, placé sous la tutelle du ministre chargé de la formation professionnelle. Mise en route le 01/01/2019 • Gouvernance quadripartite… a arrêté des comptes définitifs et qui, indépendamment de l’exactitude du coût complet estimé par [l’établissement], nous renseigne sur trois données essentielles : les dépenses d’aide exceptionnelle et d’aide unique, les transferts aux Opco, la masse salariale des apprentis (utile pour reconstituer d’autres dépenses).
Les principaux écarts entre les comptabilités de France compétences et du ministère du Travail sont les suivants :
- France compétences inclut les rémunérations versées aux apprentis (9 Md€) dans le financement de l’apprentissage. Le salaire n’est cependant pas un “financement de l’apprentissage”, mais la contrepartie du travail fourni par l’apprenti. La faible productivité de l’apprenti, qui n’est pas encore formé et suit des enseignements sur son temps de travail, est déjà prise en compte dans sa rémunération. Avant 2021, les comptes n’incluaient pas les rémunérations ;
- Ni France compétences, ni le ministère du Travail n’intègrent les allégements généraux de cotisations sociales auxquels les contrats d’apprentissage sont éligibles depuis 2019, alors qu’auparavant les exonérations spécifiques étaient incluses dans la dépense. Leur montant était alors agrégé à celui des exonérations de cotisations salariales et des exonérations spécifiques allouées aux employeurs publics que les deux institutions continuent de comptabiliser.
- La cohérence exige d’inclure les allégements généraux dans les calculs, d’autant que cela est indispensable pour estimer les coûts de l’effet emploi et de l’effet de substitution engendrés par l’aide exceptionnelle.
- Le total de ces allégements généraux est délicat à estimer sans données précises sur les salaires : pour une masse salariale de 9 Md€ en 2021, ils seraient de l’ordre de 2,85 Md€, à inclure dans le financement de l’apprentissage.
- Si l’addition du ministère est classique, celle de France compétences amalgame ce qui sort des poches des uns et des autres (France compétences, apprentis, employeurs) sans soustraire ce qui rentre, donc en ignorant les transferts entre eux. Cela vaut pour l’aide exceptionnelle et l’aide unique que reçoivent les employeurs mais qui ne sont pas déduites des financements qu’ils versent ; il en va de même pour les ressources des CFA provenant des apprentis et des employeurs (31 et 111 Md€) ;
- Au total, France compétences et le ministère sous-estiment certaines dépenses (allégements) mais France compétences commet des erreurs d’interprétation et de calcul qui conduisent à des doubles comptes, et à surestimer le coût de l’apprentissage pour les finances publiques. »
Le coût élevé de l’apprentissage
« Nos estimations chiffrent la dépense publique pour l’apprentissage à 15,7 Md€ en 2021, soit à peu près à mi-chemin des estimations de France compétences et du ministère du Travail (mais c’est un hasard), et 19,9 Md€ en 2022.
Le coût du dispositif aurait donc été multiplié par 3,4 en quatre ans, cependant que les bénéficiaires n’étaient “que” 2,1 fois plus nombreux : le coût unitaire moyen a donc fortement progressé, de 14 403 € à 22 736 € par an (+57,9 %) en quatre ans.
Ce coût est entendu au sens strict, c’est-à-dire durant le déroulement des contrats d’apprentissage. Mais les apprentis acquièrent des droits sociaux non négligeables - assurance chômage, prime d’activité, et surtout retraites - qui pourraient être pris en compte dans le coût complet de l’apprentissage. »
Bruno Coquet
Conseil/expert (économie, emploi, protection sociale, politiques publiques) @ UNO Etudes & Conseil
Parcours
Conseil/expert (économie, emploi, protection sociale, politiques publiques)
Expert associé
Conseiller scientifique & Secrétaire général du Conseil d’orientation pour l’emploi
Directeur
Conseiller du Directeur général emploi et formation professionnelle
Sherpa G20
Président - Comité de l’emploi (EMCO)
Vice-président, Comité de l’emploi de l’Union européenne
Sous-directeur - Stratégie, évaluation des politiques, Innovation
Chef de mission adjoint - Mission d’analyse économique
Chef de service - Prévisions des ventes et des fabrications
Macro-économiste/ prévisionniste
Consultant - Organisation & Management de Projet
Établissement & diplôme
Doctorat d’économie
Diplômé
Master, Management technologies de l’information
Fiche n° 49450, créée le 20/06/2023 à 16:19 - MàJ le 16/09/2024 à 16:27
Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE)
• L’Observatoire français des conjonctures économiques est un organisme indépendant de prévisions, de recherche et d’évaluation des politiques publiques hébergé par la Fondation nationale des sciences politiques
• Création : 1981 à l’initiative de Raymond Barre
• Effectif : 40 chercheurs
• Président : Xavier Ragot
• Directeur principal : Xavier Timbeau
• Contact : Sylvie Le Golvan , responsable relations publiques
• Tél : 01 44 18 54 07
Catégorie : Associations / Fondations
Adresse du siège
10 Place de Catalogne75014 Paris France
Fiche n° 7682, créée le 27/09/2018 à 08:42 - MàJ le 21/10/2024 à 12:01