Financement de l’apprentissage, reconversions : 10 propositions de Syntec, la FBF et France Assureurs

News Tank RH - Paris - Actualité n°313135 - Publié le
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Gauche à droite : Laurent Giovachini (Syntec) ; Florence Lustman (France Assureurs) ; Maya Atig (FBF). - ©  News Tank.

« Instaurer une prise en charge pérenne des frais pédagogiques de l’apprentissage par l’État à hauteur de 50 %, quel que soit le niveau de formation » et « pour soulager le financement du dispositif d’apprentissage, plafonner les NPEC à 9 500€ par an », telles sont les deux principales propositions sur le financement de l’apprentissage, portées par trois fédérations professionnelles.

Syntec, France Assureurs • Organisme de représentation professionnelle des entreprises d’assurance en France.• Création : juillet 2016• Représente 252 sociétés• Missions : - Préserver l’ensemble du champ économique et… et la FBF • Organisation professionnelle représentative des 337 banques françaises et étrangères qui exercent leur activité en France. • Création : 2001 • Missions : - promouvoir l’activité bancaire et… ont livré ces propositions à l’occasion de la présentation de leur livre blanc « Apprentissage et reconversion pour relever ensemble le défi des compétences », le 25/01/2024, dans les locaux de France Assureurs. Sur le financement de l’apprentissage, les trois fédérations patronales proposent, par ailleurs, de fixer « un objectif de baisse des coûts contrat égal au gain de productivité de l’économie française ».

Le livre blanc et les propositions associées portent également sur l’amélioration et la simplification de l’accès à la formation et aux dispositifs de reconversion professionnelle ainsi que sur la gouvernance de la formation et de l’apprentissage.


« Avancer sur ce qui n’a pas fonctionné suite à la loi de 2018 » (Antoine Foucher Président fondateur @ Cabinet Quintet
, Quintet • Cabinet de conseil en stratégie sociale, formation et raison d’être• Création : octobre 2020 (par Antoine Foucher, Pauline Calmès, Damien Delevallée, Alain Druelles et Bertrand Lamberti, cinq… )

Antoine Foucher, président de Quintet - ©  News Tank.
« La loi de 2018 reposait sur la conviction que le principal avantage compétitif de la France résidait dans les compétences, si nous ne voulons pas devenir des sous-traitants de l’économie mondiale. Le succès de la loi a été inespéré car nous avons presque triplé le nombre d’apprentis avec 837 000 entrées en apprentissage en 2022 et nous avons multiplié par quatre le nombre d’utilisateurs du CPF », indique Antoine Foucher, président du cabinet Quintet, qui a accompagné les trois fédérations dans leurs travaux sur ce livre blanc. « Malgré cette réussite globale et cette libération des énergies, tout n’a pas fonctionné dans la mise en œuvre de la loi de 2018. Sur les reconversions, les dispositifs ne fonctionnent pas vraiment et nous avons désormais à travailler sur la question du financement du système, en particulier sur celui de l’apprentissage ».

« Ce livre blanc n’est pas un cahier de doléances ou de revendications, mais il s’agit de propositions courageuses, chiffrées et argumentées, portées par les trois fédérations professionnelles qui dépassent leurs propres enjeux pour se placer à un niveau sociétal. »

Propositions transmises au cabinet de la ministre Catherine Vautrin

Laurent Giovachini, président de la fédération Syntec. - ©  News tank
« Nos propositions interviennent à un moment très particulier car nous n’avons qu’une composition partielle du gouvernement, avec certes madame Vautrin, ministre du Travail, de la Santé et des Solidarités, mais nous ne savons pas encore qui seront le ou les secrétaire d’État ou ministre délégués qui lui seront rattachés et qui seront en charge de la formation professionnelle », indique Laurent Giovachini Président par intérim du conseil d’administration @ Ensta Paris (École nationale supérieure de techniques avancées) • Président @ Fédération Syntec
, président de la Fédération Syntec • Organisation regroupant des syndicats professionnels dans les professions de l’ingénierie, du numérique, du conseil, de l’événementiel et de la formation professionnelle• Création … .

« Nous attendons leurs nominations pour les rencontrer et leur présenter ces propositions, mais elles ont déjà été transmises au cabinet de la ministre Catherine Vautrin. Le Medef, dont nous sommes membre, est également très à l’écoute de ces propositions. »

Les 10 propositions du livre blanc « Apprentissage et reconversion : pour relever ensemble le défi des compétences »

Propositions centrées sur l’apprentissage

Proposition 1 : Réguler les NPEC des contrats d’apprentissage par les branches en fonction des besoins des entreprises. 

« Aujourd’hui France compétences • Établissement public administratif créé par la loi du 05/09/2018, placé sous la tutelle du ministre chargé de la formation professionnelle. Mise en route le 01/01/2019 • Gouvernance quadripartite… encadre étroitement la définition des NPEC, alors que les branches sont en lien permanent avec les acteurs de la formation et leur association plus étroite à la définition pourrait finalement être une source d’économies. » Laurent Giovachini (Syntec).

Proposition 2 : Mettre en place une prise en charge pérenne par l’État des frais pédagogiques des apprentis à hauteur de 50 %, quel que soit le niveau de formation.

« L’apprentissage relève de l’intérêt général, or 100 % des frais pédagogiques sont aujourd’hui financés par les employeurs. Nous proposons que l’État contribue à hauteur de 50 % plutôt que de devoir gérer les déficits de France compétences et cette prise en charge permettrait de dégager des marges de manœuvre. » Laurent Giovachini (Syntec).

Proposition 3 : Fixer, en parallèle, un objectif d’économies pérennes qui impliquerait une baisse du niveau moyen annuel des NPEC égal au gain de productivité de l’économie française, en tenant compte de l’inflation, et un plafonnement des niveaux de prise en charge de l’apprentissage à 9 500 euros pouvant être porté à 12 000 euros pour les formations dites « cœur de métier » et ce, quel que soit le niveau de formation.

« Un plafond unique de prise en charge à 9 500 euros avec quelques exceptions à 12 000 euros, par exemple pour des métiers très tendus comme celui de développeur dans la branche Betic, couplé avec les gains de productivité générerait dès la première année 360 millions d’euros d’économies, soit environ 1,3 milliard d’euros sur trois ans  », selon le livre blanc.

Proposition 4 :  Aménager les pratiques existantes afin de sécuriser le financement des contrats d’alternance. Par exemple, fixer l’entrée en vigueur des nouveaux NPEC au 1er janvier de l’année n+1, ou prendre en compte la durée de la formation plutôt que la durée du contrat pour le financement des Opco aux CFA /OFA. Cette maîtrise des dépenses devra également s’appuyer sur des coûts justes et maîtrisés des CFA au travers, notamment, du mécanisme de la comptabilité analytique qui constitue un indicateur utile, sans sacrifier aux enjeux de qualité, d’innovation et d’investissement nécessaires.

« Il s’agit ici de donner une meilleure visibilité aux CFA/OFA sur les niveaux de prise en charge annuels pour une entrée en vigueur au 1er janvier de chaque année. Aujourd’hui il n’existe pas de date précise et les annonces se font plutôt en avril ou juin alors que la plupart des rentrées se font sur la période septembre-octobre pour les OFA et CFA. » Laurent Giovachini (Syntec).

Un enjeu de souveraineté… et de féminisation dans le digital

« L’apprentissage est un enjeu de souveraineté économique pour notre pays, je parle plus particulièrement de l’apprentissage dans l’enseignement supérieur pour nos secteurs. Il permet aux étudiants de financer leur formation dans l’enseignement supérieur tout en contribuant au PIB du Pays. Il permet également de rapprocher l’entreprise du monde académique. Dans nos métiers du numérique, l’apprentissage contribue à la féminisation des métiers du digital à l’heure où nous travaillons sur des algorithmes essentiellement conçus par des hommes. » Laurent Giovachini (Syntec). 

Propositions centrées sur les reconversions professionnelles

Proposition 5 : Créer un dispositif unique d’évolution ou de reconversion, simple, lisible et efficace (interne/externe), appelé période de reconversion, en remplacement de deux dispositifs qui n’ont pas suffisamment fait leurs preuves jusqu’à présent :

  • la reconversion ou promotion par alternance (Pro-A)
  • les Transitions collectives - et en réorientation du FNE.

La « période de reconversion » serait ouverte à tous les actifs, quel que soit leur âge ou leur niveau de qualification et pourrait également faire l’objet d’une mobilisation du CPF.

Florence Lustman présidente de France Assureurs - © DR.

Sur les reconversions professionnelles, l’enjeu est aujourd’hui de simplifier les choses : « Quand on interroge les 18 millions de salariés, 50 % d’entre eux répondent qu’ils envisagent sérieusement de se reconvertir, on sait par ailleurs que les jeunes qui rentrent sur le marché du travail changeront 13 à 15 fois de vie professionnelle. Aujourd’hui 500 000 personnes par an ont un projet de reconversion. Mais dans ce contexte, nous avons aujourd’hui des dispositifs nombreux et peu lisibles. En 2020, 150 000 personnes ont eu recours au CEP et 20 000 ont utilisé le PTP, soit 170 000 projets sur 500 000. Le nouveau dispositif unique de “période reconversion” permettrait de sécuriser grâce au maintien du contrat de travail et la prise en charge de la formation par l’Opco. » Florence Lustman, présidente de France Assureurs.

Les dispositifs Pro-A, Transco et FNE représentent un budget de 350 millions d’euros annuels, soit 70 000 bénéficiaires par an sur la base d’un coût moyen de 5 000 euros par reconversion, sans dépense publique supplémentaire, indique le libre blanc.

Proposition 6 : Compléter ce nouveau dispositif par l’adaptation du contrat de professionnalisation qui passera par :

  • L’harmonisation des périodes d’essai des contrats de professionnalisation et d’apprentissage ;
  • L’élargissement de l’éligibilité des formations à celles préparant une qualification reconnue par la CPNEFP (Commission paritaire nationale de l’emploi et de la formation professionnelle) de la branche dont relève l’entreprise.

Propositions centrées sur la formation et les certifications

Proposition 7 : Instaurer un mécanisme de co-responsabilité pour la création/révision des diplômes et des titres entre les branches professionnelles et les acteurs publics.

« Disposer d’une population active bien formée est un atout pour le pays et nous proposons un pilotage de ces politiques de formation en fonction de leurs résultats et donc de la pertinence des formations pour le marché du travail », indique Maya Atig Directrice générale @ Association française des banques (AFB) • Directrice générale @ Fédération bancaire française (FBF) • Directrice générale adjointe @ Fédération nationale du Crédit Agricole
, directrice générale de la Fédération Bancaire Française. « Les branches sont les plus proches des besoins exprimés par leurs entreprises. Actuellement, lorsqu’un besoin de création est exprimé par une branche, la demande rentre dans un tunnel d’expertise chez France compétences et nous souhaitons que le système devienne davantage fluide pour déboucher sur davantage de décisions d’accords ».

Proposition 8 : Intégrer les habilitations obligatoires pour certains métiers réglementés au répertoire spécifique de France compétences, en respectant leurs spécificités.

Proposition 9 : Clarifier l’imbrication des différentes normes et contrôles qualité des prestataires et, parfois, leur contenu. Plus précisément, il est proposé de différencier les opérateurs du contrôle qualité et du contrôle de service fait.

« Un tiers des formations seulement, font l’objet d’une certification Qualiopi, or l’enjeu qualité est essentiel pour la personne qui s’engage dans une formation. Il faut évoluer et travailler sur le référentiel Qualiopi, qui repose essentiellement aujourd’hui sur du déclaratif, sans conduire à un accroissement de la complexité pour les acteurs. »

Proposition 10 : Garantir l’adéquation entre les formations et les besoins en emploi et en compétences :

• en publiant, notamment auprès des jeunes et de leur famille, les taux d’insertion durable à 6 mois dans l’emploi des formations existantes ;

• en ne renouvelant pas les formations financées sur fonds publics dont le taux d’insertion durable à 12 mois dans l’emploi est inférieur à 50 % au cours des deux dernières promotions.

Maya Atig, directrice générale de la FBF (Fédération bancaire française) - ©  News Tank.

« L’offre de formation doit rencontrer les besoins du marché d’emploi et le taux d’intégration dans l’emploi  doit être un critère déterminant. Pour nos formations financées par notre Opco Atlas • Opco des services financiers et du conseil• 13 branches professionnelles :- Agents généraux d’assurance- Courtage d’assurances et de réassurances- Sociétés d’assurances- Sociétés d’assistance… , nous sommes sur 86 % de taux d’insertion dans l’emploi pour les personnes qui ont décidé de travailler directement, au terme de la formation et non de poursuivre avec une autre formation », déclare Maya Atig. Nous proposons que ce taux d’insertion dans l’emploi soit indiqué pour toutes les formations en apprentissage."

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Gauche à droite : Laurent Giovachini (Syntec) ; Florence Lustman (France Assureurs) ; Maya Atig (FBF). - ©  News Tank.